Olmo Calvo |
L'actualité ne se lasse pas de nous offrir quotidiennement son lot de ridicule. Et de spectacle. La grosse affaire du moment, après la tragédie au sein du FN, et avant l'indignation collective annoncée devant la nouvelle relaxe de DSK, c'est donc Valls et le foot. Bien. Pour une fois, j'avais envie de prendre la défense du petit-fils du créateur de l'hymne du FC Barcelone. Comment résister à une invitation pour la finale de la plus grande compétition européenne, surtout lorsque le Barça la joue et peut devenir la première équipe à réaliser deux triplés (championnat et coupe nationaux suivis de la coupe d'Europe) ? Personnellement, je n'aurais pas pu. Et puis, après tout, le type est Premier ministre et se déplace en avion officiel lorsqu'il reçoit une invitation non moins officielle - si tant est qu'elle ait existée. Qu'il y emmène ses enfants, sa femme ou son chien, cela change quoi ? C'est parce que c'est du foot, que l'on feint de s'offusquer ?
Mais j'ai préféré me taire après les derniers propos de cet "imprésentable" comme on dit en castillan des personnes que c'est pas la peine. J'ai l'impression, je fais peut-être preuve de mauvais esprit, que notre pays va mal. Que n'importe quelle anomalie peut soudain prendre une importance disproportionnée. Que les journalistes et les réseaux sociaux en pleine crise existentielle amplifient désormais tout ce qui leur tombe sous la main, que chaque crétin (je m'inclus dans le lot) y va de son avis et que le brouillard qui se dégage de cette cacophonie précipite la confusion mentale qui nous frappe tous.
Que cette péripétie devienne une affaire d'Etat en dit long en revanche sur le déficit de sens dans ce domaine. Et puis, il faut bien le dire, ce genre d'info, de dossier brûlant, c'est non seulement on ne peut plus facile - on a tous compris de quoi il retourne - et pratique. Moins facile serait de consacrer le même temps d'antenne et le même espace de débats médiatiques, allez, au hasard, au GMT. Le quoi ? Vous voyez, il faut expliquer. Il ne s'agit nullement d'une compétition sportive ou d'une institution corrompue. Le GMT, c'est le grand marché transatlantique qui se négocie dans le plus grand secret - très loin des caméras tout au moins et de l'attention des citoyens - et qui risque de transformer à jamais nos vies en marchandises. L'un des points de ce traité de libre échange avec les USA réside dans l'instauration de tribunaux d'arbitrage, mécanisme permettant aux investisseurs d’attaquer les Etats au motif qu’ils auraient adopté des législations contraires aux intérêts des entreprises... Les cas d'Etats traînés en justice par les multinationales se comptent déjà par centaines. C'est sur ce point justement que l'harmonie a manqué il y a quelques jours au Parlement européen. Craignant de ne pas obtenir la majorité et d'essuyer un rejet du texte proposé au vote, le Président du parlement européen a préféré ajourner le scrutin prévu de longue date. Histoire également de ne pas ébruiter un quelconque désaccord. C'est que dans certains pays, en Allemagne, en Belgique, mais aussi chez nous, malgré une assourdissante non-médiatisation de ces négociations, la mobilisation citoyenne pourrait bien faire échouer ce grand projet. Et moins on en parle, plus de chances ont les ultralibéraux de nous pourrir définitivement la vie.
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