samedi 31 janvier 2015

A suivre

C'est en ce moment, dans ma ville chérie.

Du terrorisme et de l'infantilisation de nos vies

Au lendemain de la tuerie de Charlie, ma compagne promenait le chien avec sa fille quand une bande de gamins du quartier, et à vélo, ont brandi sur elles des mitraillettes imaginaires en braillant : « Nous aussi, on va faire des attentats ! » La petite était choquée, prise soudain d'un sentiment d'insécurité, reprochant à sa mère de s'être installée dans une banlieue couvant en son sein de futurs apôtres du terrorisme. C'est un enfant. On a tenté de la rassurer en supputant chez ces autres enfants la connerie plutôt qu'une réelle détermination à aller se former en Syrie à leur majorité. 

vendredi 30 janvier 2015

Monsieur Jean


 

Quand j'étais môme, Gabin, c'était la télé. Les films du dimanche soir. Je crois que mon père l'aimait bien, mais il ne regardait que très rarement le cinéma à la télé, sauf les films noirs donc. Et je crois que ma mère ne l'aimait pas trop, lui préférant Gérard Philipe – je sais…
Je n'ai pas vu Le clan des siciliens et ce genre de productions, découvert récemment Le pacha – pas terrible d'ailleurs. 
Je me souviens de Maintenant, je sais. Ça nous faisait rire quand il s'essayait de chantonner, la voix mal assurée. On ne savait pas qu'il avait commencé par là, danseur, chanteur, peut-être même gigolo comme Delon plus tard.
Ce n'est qu'avec la soif de voir, de découvrir, de sortir de la nasse, vers 20 ans, avec les ciné-clubs de Claude-Jean Philippe et de Patrick Brion, que j'ai découvert le Gabin des années 1930 : Pepé le Moko, La bandera, Le jour se lève, La belle équipe, La bête humaine, La grande illusion… Que des classiques à son palmarès en une poignée d'années, pépère. J'avais face à moi, dans le noir et en noir et blanc, seul, quand tout le monde pionçait à la maison, et moi-même luttant contre le sommeil, ce type qui ressemblait aux copains de mon père, crédible dans ces métiers de prolos. Ça parlait comme quand j'étais môme et ça se déroulait dans des décors que je croyais avoir connus. En ce temps-là, la banlieue commençait sa longue agonie défigurée mais les terrains vagues, les "immeubles de rapport", la vie de quartier, les usines, les bistrots abordables, ça existait encore – et plus qu'il n'en fallait, comme on l'a vu par la suite. 
La Nouvelle vague pouvait avoir brocardé le cinéma de papa, j'aimais Gabin, sa présence, son assurance. Ses personnages et ses drames me touchaient davantage que les historiettes des jeunes premiers du cinéma-stylo, du cinéma à la première personne, mis à part quelques exceptions. Mais je me sentais obligé d'aimer Chabrol, Rohmer, Godard, Truffaut et tous les autres. Et Bresson et son cinématographe, pôle opposé du "réalisme-poétique" de Carné/Prévert, Duvivier, Renoir et cie. Pour plaire à qui, on se le demande. 
En lisant l'an passé la biographie de Renoir par Pascal Merigeau, je me suis bien marré. J'ai retrouvé, en plus détaillé bien entendu, les prises de position ordurières du fils de Pierre-Auguste Renoir, relatées longtemps par le seul Henri Jeanson. Et les retrouvailles houleuses de ces deux vieux amis pour French cancan. Gabin le résistant ne pardonnera jamais à l'autre Jean ses déclarations à propos du trop de juifs dans le cinéma français, sa collaboration zélée avec Vichy et sa fuite en Amérique. Bizarrement, c'est ce Jean que ceux que l'on a nommé les jeunes Turcs se sont choisi comme parrain.
Aujourd'hui, le cinéma du dimanche soir a certainement disparu des petits écrans. Je n'en sais rien et je m'en contrefiche. Aucun programme ne fédère autant que les émissions de téléréalité, ces exhortations à la délation collective, nouveaux jeux du cirque à l'instar des débats politiques ou des rencontres sportives. Je ne suis plus rien. Je ne cherche même plus à comprendre.     
Gabin a reconnu n'avoir pas fait que des chefs d'œuvre, comme on dit, avoir joué sur le tard sur une corde idéologique ambiguë, mais Gabin restera à jamais, j'en suis sûr, ma madeleine à moi.

Princesse

C'est l'histoire de Fernandinho, jeune brésilien persuadé que son corps était une erreur et qui décide de devenir Fernanda afin de pénétrer, si j'ose dire, l'univers du désir des hommes, en s'installant en Italie. Si j'ai bien compris, c'est en prison que Fernanda Farias De Albuquerque rencontre Maurizio Jannelli, membre des Brigades rouges. Leur liaison les incite à écrire, à quatre mains, l'histoire de Fernandinho/Fernanda, parue en 1994 et intitulée Princesa



Deux ans plus tard, le Gênois Fabrizio de André (1940-1999) en fait cette chanson que l'on trouve dans son dernier album, Anime salve et  dont je trouve une traduction sur internet. De André, poète anar, a toute sa vie chanté les petites gens (exclus, marginaux, pauvres, prostitués), parfois en dialecte, et traduit en italien Ferré, Brassens, Dylan ou Cohen.

Je suis la brebis je suis la vache
qui aime jouer aux animaux
Je suis la fille chemise ouverte
petits tétons à sucer.

Sous les yeux de ces arbres
dans le clair-obscur où je suis né
l'horizon précédant le ciel
était le regard de ma mère.

"Fernandino est comme une fille
il m'apporte le café et le tapioca au lit
et pour lui rappeler qu'il est né mâle
il y aura l'instinct il y aura la vie".

Et moi devant le grand miroir
je me cache les yeux avec les mains
pour imaginer entre mes jambes
une minuscule chatte.

Dans le demi-sommeil du bus
je laisse mon enfance paysanne
je cours vers la magie des désirs
je vais corriger le sort.

Dans la cuisine de la pension
je mélange les rêves avec les hormones
à l'aube il y aura la magie
il y aura des seins miraculeux.

Pourquoi Fernanda est-elle vraiment une fille
qui veut faire l'amour comme une fille
alors que Fernandino résiste et vomit
et se tord de douleur.

Et donc le bistouri pour les seins et les hanches
dans un vertige d'anesthésie
jusqu'à ce que mon corps me ressemble
sur la promenade du bord de mer de Bahia.

Sourire tendre de feuille verte
je retire mes mains de ses cheveux
quand les voitures braquent leurs phares
sur la scène de ma vie.

Où parmi des embouteillages de désirs
un mâle se pend à mes fesses
dans ma chair entre mes lèvres
un homme glisse l'autre se rend.

Fernandino est mort dans mon giron
Fernanda est une poupée de soie
ce sont les braises d'une seule étoile
qui éclate de lumière au nom de Princesse.

Maintenant Princesse offre son cœur
à un avocat de Milan
et une promenade récidiviste
dans la pénombre d'un balcon.

o matu (la campagne)
o cé¨u (le ciel)
a senda (le sentier)
a escola (l'école)
a igreja (l'église)
a desonra (la honte)
a saia (la jupe)
o esmalte (le vernis)
o espelho (le miroir)
o baton (le rouge à lèvres)
o medo (la peur)
a rua (la route)
a bombadeira (la modeleuse)
a vertigem (le vertige)
o encanto (l'enchantement)
a magia (la magie)
os carros (les voitures)
a policia (la police)
a canseira (la fatigue)
o brio (la dignité)
o noivo (le fiancé)
o capanga (le garde)
o fidalgo (le grand seigneur)
o porcalhao (le salaud)
o azar (la poisse)
a bebedeira (la cuite)
as pancadas (les coups)
os carinhos (les caresses)
a falta (le fiasco)
o nojo (le dégoût)
a formusura (la beauté)
viver (vivre)

Bonnes nouvelles d'Espagne (et pas que pour les Espagnols)


Lola est de retour à Paris. Pour combien de temps, nul ne le sait, pas même elle. On a pris un café hier, parlé de sa mère, malade, et de la mienne, convalescente. Elle m'a appris que son ami Miguel, ancien correpondant à Paris du quotidien El Pais, grand amateur de flamenco, bon vivant et supporter indécrottable de l'Atlético de Madrid - personne n'est parfait - avait enfin lancé son nouveau journal. Je savais qu'il avait été viré comme un malpropre après plus de vingt ans de bons et loyaux papiers, de Lisbonne à Paris, donc, en passant par Rome. Trop voyagé, trop cher, ont dû penser les dirigeants du groupe Prisa. Tiens, mon petit Miguel, ça te dirait de rentrer enfin à la maison ? J'imagine qu'ils ont dû lui payer le billet, et peut-être même celui de sa femme et de ses deux filles. El Pais est un titre respectable. 

Ligne de défense

Ancien du GUD, admirateur de Mussolini, ami de Dieudonné, et surtout chargé de la com' du FN, Frédéric Chatillon vient d'être mis en examen pour «faux et usage de faux», «escroquerie», «abus de bien social» et «blanchiment d’abus de bien social». Rien de moins. La présidente du parti, amie intime du gars, déclare que cette affaire a pour but de salir son image et qu'elle n'est nullement concernée par tout cela. Des images de son discours. En substance... 

jeudi 29 janvier 2015

Comment ça va ?

Quelque part

Petit film fabriqué avec des ados de Villepinte (93), sous forme d'atelier et d'impros. Les jeunes ont choisi les thèmes, imaginé l'histoire, et joué pour la première fois. Les profs ont tenté de censurer ce court métrage jugé dégradant, provocateur et dangereux... Véridique !

Le corps, une marchandise comme les autres ?

Notre ami, à l'aise dans le noir
Effectivement, derrière l'écran de fumée médiatique constitué, en vrac, de la lutte anti-terroriste, des mauvaises fréquentations de Syriza, de l'ouverture de nos merveilleux centres commerciaux le dimanche, de la flexibilité de nos emplois ou de la courbe inflexible du chômage, de nouvelles enjambées sur la route de l'ultralibéralisme et de la marchandisation de l'être humain sont allégrement réalisées dans l'ombre par nos lumineux amis socialistes. C'est à lire ici.

mercredi 28 janvier 2015

Noir c'est noir

J'ai toujours aimé le film noir. Le film noir, le western et le foot. Comme mon père. 




Je dois avoir 6, 7 ans. Nous rentrons de l'école, ma soeur et moi, pour aller déjeuner chez mes parents. Rue des deux communes, nous tombons sur ma mère, en pleurs. Ma grand-mère vient de mourir. Je lui prends la main. On fait une pause à la mercerie de la rue pour acheter des bas noirs. 
Je connais mal la mère de ma mère. J'apprendrai bien plus tard pourquoi. Mais d'elle, j'entends, dans la bouche de ma mère, qu'elle est la personne la plus bonne de la terre, que mon petit frère a hérité de ses yeux bleus. 
Le soir, ma mère attend que mon père soit rentré du travail, sa valise prête. Dès son arrivée, il se rend au café de Guy Roudière, appeler un taxi. Puis revient nous chercher. Ma mère nous embrasse, emmène avec elle mon frère et monte dans la voiture garée devant le bistrot. Mon père nous ramène, ma soeur et moi, à la maison. Nous ne disons rien de notre indignation, nous ne savons même pas que ça existe. Nous nous sourions simplement en cachette. C'est devenu un souvenir longtemps rappelé entre nous, ce soir de la diffusion de M le maudit à la télé. Mon père ne veut manquer ce film pour rien au monde et n'hésite pas à abandonner sa femme à la noirceur de son deuil.
Enfant, j'ai lutté pour aimer ce genre cinématographique. Je me laissais emporter par la lumière, les ombres inquiétantes du noir et blanc et avais souvent recours à ma grande soeur pour qu'elle me dise où nous en étions de l'intrigue. 
J'ai vu plusieurs fois le film de Lang. Je l'ai montré à mes filles il y a quelques années. Mais il me semble que ce soir de 1970, il s'agit du remake hollywoodien, réalisé par Joseph Losey. 
Je n'ai jamais eu l'occasion de voir cette version. Ni à la cinémathèque, ni aux différents ciné-clubs de la télévision en mes années d'apprentissage. Aujourd'hui, je me demande s'il s'agissait seulement de ce film. Un film noir en tous cas. 

De guingois


Née de parents espagnols communistes, exilés en France en 1939, Lydie Salvayre prétend parler un français de guingois et revendique le blasphème, le mauvais goût de sa double culture. 
Je me régale à l'écouter chaque soir sur France culture, à voix nue. Comme je l'aime...
On peut en faire autant ici.

Deux

Elliott Erwitt

La chose au monde que je souhaite le plus, c'est que tu meures avant moi. Pour être là quand les employés municipaux te glisseront dans le cerceuil, pour suivre ton enterrement, l'oeil sec, pour voir l'argile ensevelir tes prétentions, pour enfin revenir à la maison, m'asseoir dans ton fauteuil, allumer une de ces cigarettes que tu ne supportais pas et goûter voluptueusement, égoïstement, une par une, ces minutes que tu ne connaîtras jamais.

Jean-Paul Dubois, Parfois je ris tout seul

mardi 27 janvier 2015

La recette du succès en littérature

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On pourrait aussi bien dire :
«le monde, c'est 70 % d'eau et deux milliards de Chinois, donc écrivons des vies de marins chinois».

Pierre Senges

De nos vies

Je n'ai pu m'empêcher, en rangeant les livres de Pierre Lamalattie dans ma nouvelle chambre et ma vieille bibliothèque, de feuilleter le plus petit d'entre eux, celui intitulé Portraits qui, à chaque fois, produit chez moi le même effet : rire et embarras. 
En quelques mots, sorte de brefs CV, ce peintre-écrivain croque, pour ne pas dire dézingue, une centaine de personnages contemporains proches de nous, à qui nous pourrions terriblement ressembler. Il n'a pas son pareil (Houellebecq, peut-être, mais faut voir) pour trouver la faille dans nos personnalités, notre image, affichant jusqu'au vertige notre suffisance, la banalité de notre connerie, le vide sidéral de nos existences absurdes, la novlangue de nos sociétés et en particulier celle du monde du travail. 
Je remercie le ciel de ne jamais avoir croisé sa route, je sens déjà suffisamment le poids de ma bêtise au quotidien...
Ses trois livres, celui-ci et deux romans, sont publiés chez L'Editeur.

Au bureau


Siècle d'or

C'est en 1870 que l'Académie royale espagnole officialise l'hypothèse selon laquelle le grand écrivain Miguel de Cervantes Saavedra aurait bel et bien été enterré le 23 avril 1616 au couvent de las Trinitarias Descalzas de San Ildefonso de la rue Cantarranas, désormais rue Lope de Vega, en plein coeur du quartier de las Huertas de Madrid, communément nommé (Barrio de Las) Letras (Quartier des Lettres). 
Quelques années plus tard, plus précisément samedi dernier, après 9 mois de fouilles, étaient découverts quelques morceaux de ce qui pourrait être le cercueil du Manchot de Lepante ; les initiales MC formées par une poignée de punaises permettant d'accréditer fortement cette nouvelle. 

lundi 26 janvier 2015

Charlie et les autres

Ce matin, j'ai vu ma copine Maud. Plusieurs semaines s'étaient écoulées depuis notre dernier café. On a donc évoqué les événements de fin d'année, déménagement, emménagement, recherche de boulot (pour elle) (c'est vrai que je devrais peut-être m'y mettre aussi…), les enfants, etc. Et puis, on en est arrivé à Charlie Hebdo. J'ai raconté combien cet acte odieux avait bouleversé la petite tribu de ma fille et ses potes, en touchant directement sa meilleure amie. Combien les paroles que j'ai pu avoir avec mes filles m'avaient semblé dérisoires. Maud était navrée, consternée, désolée que ma fille ait été confrontée si jeune à une mort aussi violente, à ce que représente dans ce cas bien précis la disparition d'un père.…

Sommes-nous de connivence ?


Ma première fille était née et il fallait que j'améliore mes performances économiques. Plus question de piger à droite, et surtout à gauche, de voyager à travers le monde aux frais de la princesse et de ses amants. Un nouveau magazine de mode se créait et on avait proposé à la mère de ma fille un boulot de correctrice pour la fabrication du numéro 0. Prise ailleurs, il me semble, ou n'étant pas persuadée de la viabilité de l'entreprise, elle m'avait mis sur le coup. Du jour au lendemain, j'étais propulsé, au sein d'un semblant d'hypo-équipe hébergée chez l'imprimeur, non seulement correcteur mais aussi secrétaire de rédaction, et assistant de la rédactrice en chef, formée à Nous deux. L'album Fantaisie militaire passait en boucle. 
Je n'en croyais pas mes yeux, encore moins mes oreilles. Ignorant tout de ses us et coutures, je pénétrais ce milieu en essayant de faire abstraction de la futilité et de l'utilité d'un tel projet, me concentrant sur la traque des mauvais accords et proposant des coupes personnelles au patron. Le magazine serait "transversal", selon le slogan de l'ancien pubard à sa tête. Ce type portait le nom d'un international de football, en avait l'allure et le cerveau, et avait fait ses gammes chez Renault, grimpant les échelons de vendeur de voitures à chef de pub je crois. Il en avait gardé la tchatche et une certaine habilité à l'heure des négos, capable de vous refourguer la bagnole invendable par quiconque, de faire passer Eric-Emmanuel Schmidt pour le nouveau Spinoza. Non, remarque, Spinoza, il ne connaissait pas. Sa culture se limitait au feuilletage des magazines que lisait sa femme, une blonde Bovary de Gif-sur-Yvette. C'est pour elle, afin qu'elle cesse d'acheter toutes les semaines un titre de déco, un titre de mode et un titre plus "culturel", genre Télérama, qu'il avait eu la lumineuse idée du transversal, un lifestyle mag à l'américaine, projet unique en France, clamait-il.
Le numéro 0 fut une réussite. Pas pour tout le monde, certes. La rédactrice en chef, une pro rigoureuse, ne supportant pas les immixtions de son chef-footballeur-vendeur-de-bagnoles avait été virée sans les formes. Je n'avais été embauché que pour ce numéro, aussi n'avais-je eu vent ni des secousses internes ni du bon accueil du titre. J'avais enchaîné les petits boulots, remplaçant un pote veilleur de nuit dans un hôtel du quartier de l'Etoile, en comptant trois ou quatre. C'est là, derrière mon comptoir, que j'avais assisté à la finale du Mondial 98 et eu écho des remous bon enfant sur les Champs voisins. Black, blanc, beur et tout ça. La couleur, justement, c'était le grand truc du lifestyle mag unique en France. C'était ce que me rappelait le boss lorsqu'il me sonnait sur mon tout nouveau portable. Il avait aimé ma présence, mon côté homme tranquille dans un monde de gonzesses hystériques. Il me voulait en tant que SR. Quel était mon prix ?

Pieds nus

On n'en est pas encore sûr, mais ça y ressemble fortement. Le tombeau de Miguel de Cervantes viendrait d'être retrouvé, enfoui au sein de la crypte du couvent de Las Trinitarias descalzas, à deux pas de la rue portant le nom de l'auteur du Quichotte, dans le quartier de las Huertas de Madrid, dit également Barrio de Las letras. On en reparle.

dimanche 25 janvier 2015

Parlons travail


A la date du 1er janvier 1962, Roger Rudigoz note :

Ecrire plus vite
Moins corriger
Voir peu de monde
Ne faire aucune visite


A la date du 12 mai 1962, assistant à une réunion du Syndicat des écrivains :

Intervention de Bonnefoy sur les histoires de patronymes et les procès intentés aux écrivains par des quidams qui croient se reconnaître dans les personnages dégoûtants. Faites la peinture d'un parfait salaud, il y aura toujours un honnête homme pour crier : « C'est moi ! »

Roger Rugigoz, A tout prix, éd. Finitude

samedi 24 janvier 2015

Le bonheur qu'on forme



La république brûle-t-elle ?

Ce matin, en descendant du bus me conduisant au boulot, pris pour cause de verglas, je suis passé devant un panneau municipal proposant une série d'infos sous forme d'affiches. L'une d'elles était particulièrement édifiante. Je regrette de ne pas posséder de smartphone dans ces cas-là.
J'ignore l'origine de cette campagne. J'ai cherché sur le site de la ville, mais je ne l'ai pas retrouvée. Trop ancienne certainement. Elle concernait les fêtes de fin d'année. Le slogan Offrons un Noël pour ceux qui n'en ont pas était illustré par deux personnages : une femme et un jeune garçon. La femme était placée derrière le gamin et avait passé les bras autour de ses épaules. Elle était blonde, il était noir. La femme aryenne et le môme qu'a rien. 

vendredi 23 janvier 2015

Encanaillons-nous !



Ça y est, le gentil Eric l'a eu ! On était vraiment content pour lui, mercredi soir. C'est qu'il l'avait raté une première fois et on commençait à s'inquiéter, avec Pierre. Il l'avait appris le jour même, et, à la place du thé habituel, il s'est permis un panaché. C'était la fête. Cette bonne nouvelle nous a réchauffé les entrailles malmenées par le froid, un repas vite avalé et un match qui allait s'avérer soporifique. 
Eric, on le connaît avec Pierre depuis quoi ? trois-quatre ans, un truc comme ça. On l'a rencontré là. Dans ce petit bar de quartier pro-Barça, tenu par une famille roumaine et où l'on avait atterri un soir je ne sais plus comment. Il faisait partie des habitués, des paumés comme nous, venus oublier chez Joe leur solitude, la médiocrité de leur existence devant un match et une bière ou deux.
Figurant qu'il est, Eric. Dans des opéras surtout. Comédien de formation, il galère comme beaucoup de jeunes dans sa situation. Alors, il fait ses heures tant bien que mal, grâce notamment à l'opéra, un tournage par-ci, par là, vivotant d'une année sur l'autre, seul, perdu dans la capitale. 
On l'aime bien, Eric. On s'est demandé un temps s'il avait une vie privée, une sexualité. Pierre se demandait s'il n'était pas pédé, même. Non pas que Pierre le trouvait à son goût, lui, ce qu'il aime, c'est les racailles de banlieue - Pierre, tu vas mal finir, par les temps qui courent !...
On l'avait un peu travaillé à la dure, le petit Eric, et il nous avait appris qu'il fréquentait depuis peu une fille rencontrée via un site. Ce jour-là aussi, on était content pour lui. Il est vraiment gentil, Eric. Jamais un mot plus haut que l'autre, passionné de ballon, de sport en général, ayant une bonne hygiène de vie, comme il l'a souligné lors de son oral d'embauche. Mais ça n'a pas duré, son histoire avec la fille. Ça collait pas. Ça arrive. 
Un soir, il s'est pointé à un match de Ligue des champions avec ses parents et leurs valises, qu'il venait de récupérer à la gare. Il paraît que ça les intéresse, le foot.
Un jour aussi, il nous a confié qu'il avait décidé de changer de boulot, de se recycler. En quête de stabilité. Il en avait marre de courir le cachet, de renvoyer son carton d'intermittent tous les mois, d'attendre le traitement de son dossier dans l'angoisse d'un énième plat de pâtes. A trente et quelques balais, c'était le moment ou jamais. Il voulait entrer dans la fonction publique. Passer des concours, tout ça. La SNCF, il se voyait bien conduire un TGV. Ou la RATP, même si c'est sous terre, on ne travaille que six heures par jour. Il a tenté la RATP l'an dernier et été recalé. Il n'a pas eu le temps de finir les tests. On hésitait, avec Pierre, entre la désolation et la pitié. Merde, qu'est-ce qu'il va devenir, notre Eric ? On évoquait son cas entre nous, rigolards, histoire de relativiser nos malheurs respectifs. 
Et donc, mercredi matin, il passait son oral et on lui confirmait dans la foulée qu'il était pris en formation de conducteur de rame. Et ce soir-là aussi il nous a fait rire. Lorsqu'il a dit que la bière, c'était vraiment pas bon, rappelant qu'il ne buvait jamais. Mais surtout lorsqu'il a lancé, sans crier gare, que d'ici le début de sa formation prévue pour mai, il avait envie de s'encanailler. On n'avait pas entendu cette expression depuis un moment. Pierre lui a rétorqué un peu brutalement je trouve, que c'était pas en employant des formules d'un autre âge qu'il allait choper les filles de 25 ans sur les sites de rencontre. Faut plutôt dire "j'ai envie de kiffer" qu'il lui a sorti. Il est con, des fois, Pierre. Il se rend pas compte. 
Pierre lui a suggéré ensuite de s'intéresser à la fille du patron. C'est vrai, quoi, elle est là tous les soirs, a l'air gentille. Ou bien, tu n'aimes pas le côté survêt' chez les gonzesses ? Quand je dis qu'il est con, des fois... Mais Eric l'a bien pris. Il apprécie bien la fille de Joe, elle est assez intelligente, débrouillarde, a de la répartie, elle bosse dans le marketing un truc comme ça, il la trouve même jolie, mais bon, à 35 ans, elle vit encore chez papa-maman. S'intéresser à elle, c'est avoir tous les soirs la famille dans le placard de la chambre. Mais c'est vrai que c'est con, ces deux gentilles solitudes qui se croisent et se ratent comme dans un film de Demy. Pierre en a repris un en se demandant à haute voix si elle n'était pas lesbienne, la fille de Joe. C'est une obsession, chez lui. Mais la fille qui ne veut pas se l'avouer, qui ne le sait peut-être même pas. Eric ne pense pas. Je n'ai pas d'avis. Je m'en fous un peu. Mais quoi qu'il en soit, je me dis que c'est pas avec elle qu'il va s'encanailler, Eric...

La part des nuages qui pleure

Je dormais par terre, dans le bureau. Mes insomnies passaient le disque en boucle. J'avais acheté deux places pour le Zenith. Elle n'a pas voulu venir. Sa décision était irrévocable, comme notre séparation. Ma fille aînée m'avait dit, quelques mois auparavant, lors d'une première rupture : « Les parents qui se séparent, c'est qu'ils n’aiment plus leurs enfants ». Elle avait quatre ans et ça m'avait écrasé le coeur. Je chialais beaucoup à l'époque. A cause d'elles. Plus que la fin de l'histoire avec leur mère, c'était ça qui était insoutenable, ne plus être avec mes filles en permanence, ne plus me lever toutes les nuits pour vérifier qu'elles dormaient bien, qu'elles n'avaient pas froid, ne plus sentir leur odeur tous les jours. Treize ans plus tard, je ne sais toujours pas si je m’en remettrai un jour. 


Demande à la poussière


- Je savais pas que Joe Cocker était mort.
- Mais si, je te l'avais dit.
- Ah bon ? Je sais plus alors. 
- Mais si, je m'en souviens.
- C'est récent ? Le mois dernier ?
- Je sais plus.
- C'est qui encore qui est mort ? Celui qui faisait Les chiffres et les lettres...
- Lequel ?
- Alors, là, son nom...
- Bizarre, j'ai pas le souvenir qu'ils l'ont dit.
- Bernard Pivot, je crois.
- Non, Pivot c'était pas les chiffres et des lettres, c'était les livres.
- Ah, bon, je sais plus où j'ai entendu ça, moi.
- Remarque, il l'a peut-être fait quand il était jeune, ça arrive, ça.
- Ah oui, comme l'autre là...
- Patrice Laffont, ça doit être.
- Peut-être, je sais plus, moi.
- Dis-donc, c'est ton heure.
- Ah oui, je finis cette étagère et j'y vais.

 

Ce matin au bureau, conversation entre les deux femmes de ménage de moins de 50 ans

25, 26, etc.

On le sait, le 25 janvier prochain fait trembler les instances européennes et la mère Merkel en particulier. 
Le 26, faisons trembler le pouvoir en place ici et son projet de loi scélérate dite Macron qui nous prend pour des crons. 
C'est Tous Ensemble qu'il nous faut défiler contre, en vrac, la  libéralisation  de nombreuses professions réglementées, le travail du dimanche et de nuit, la réforme de l’Inspection du Travail, la nouvelle facilitation des licenciements, la remise en cause des Conseils de Prud’hommes et la précarisation socialiste de tous.

jeudi 22 janvier 2015

Fin

…et moi, j'attends que les communications soient rétablies entre les êtres.
Un jour, peut-être, nous abattrons les cloisons de notre prison ; nous parlerons à des gens qui nous répondront ; le malentendu se dissipera entre les vivants ; les morts n'auront plus de secrets pour nous. 
Un jour nous prendrons des trains qui partent.

Antoine Blondin, L'humeur vagabonde (1955)


Ruptures exemplaires

Julien Vallon

Je l'ai quittée pour qu'elle ne me voit pas vieillir
Je l'ai quittée parce qu'elle ne se lavait pas les mains après être passé aux toilettes
Je l'ai quittée parce qu'elle ne supportait pas mon rire
Je l'ai quittée parce qu'elle se retenait de jouir pour que ça dure plus longtemps et que je n'ai plus vingt ans
Je l'ai quittée parce qu'elle voulait un enfant et que nous étions trop vieux

mercredi 21 janvier 2015

Du patriotisme, de la guerre et de la relance

Les Français sont unanimes

Nos concitoyens sont fiers et veulent rester fidèles à l'esprit du 11 janvier. Le gouvernement s'exécute et rassure : la nouvelle loi antiterroriste, la quinzième en moins de trente ans, à peine promulguée déjà renforcée. Le plan Vigipirate, en vigueur depuis 18 ans, itou. « La citoyenneté – ne parlons pas d'intégration, oublions les mots qui ne veulent plus rien dire – nous le sentons bien, (...) a besoin d'être refondée, renforcée, relégitimée », renchérit notre premier ministre. Oubliée la notion d'intégration donc, mais aussi le fameux plan Marshall des banlieues, évoqué une première fois en 1995, ressorti du chapeau en 2008, définitivement enterré vraissemblablement. 


Le choc des mots, le poids des images

Et j'en lis qui chipotent sur les mots : ghetto ou apartheid ? Indignité nationale ? Peu importent les mots, il faut frapper les esprits avant l'ennemi. C'est que l'heure est grave. Nous sommes en guerre. Et quelle belle image que celle de notre président présentant ses voeux aux armées depuis un porte-avions.

Qui l'eut cru ?

10 000 hommes seront mobilisés pour combattre l'ennemi intérieur. Le même chiffre prévu par l'armée en cas de crue décennale en région parisienne...

 

La relance comme point de mire

Certes, pour mener à bien la guerre, il sera dépensé 735 millions d'euros en trois ans. Mais n'oublions pas que près de 2700 emplois seront créés en contrepartie.

Finies les bavures

D'autant qu'avec ces nouveaux dispositifs, le couac du contrôle de routine d'Amedy Coulibaly sera désormais impossible.

Front républicain (et médiatique)

Les journalistes au garde-à-vous se félicitent de l'engagement des uns et des autres. Dénoncent les plus sceptiques, leur collant à la gueule, sans rire, l'étiquette de complotistes.

Banalisation

Malencontreusement oubliée lors de la marche historique du 11, Marine Le Pen estime que c'en est fini du monde des bisounours Charlie et, selon sa sensibilité congénitale, dit tout haut ce que nos concitoyens - et Manu - pensent véritablement tout bas : « Ceux que les Français ont envie de voir défiler, ce sont les militaires ». Encore un point pour elle.

Retour vers le futur

De nombreuses voix s'élèvent d'ailleurs pour le rétablissement du service militaire, véritable "ascenseur social", supprimé il y a près de 20 ans par Chirac. Sont-ce les mêmes qui regrettent l'abolition de la peine de mort ? Pas que, me souffle-t-on.

Guerre dans le cyberespace 

Après Hollywood, c'est la France qui a été ces derniers jours victime de cyberattaques. Pas moins de 20 000, selon les sources officielles. De nombreuses entreprises, fers de lance de la relance nationale, étant prises pour cible, Manu a pu déclarer que la loi de 1991 sur les interceptions était "lacunaire", car conçue avant Internet. « Désormais, l'intégralité des opérations assurées sur le territoire national bénéficieront de la légitimité de la loi et feront l'objet d'une autorisation expresse. Ce sera un texte protecteur des libertés publiques, puisque chaque opération sera soumise à un contrôle externe indépendant, sous le contrôle d'une juridiction spécialisée ».

De beaux lendemains en perspective...

mardi 20 janvier 2015

Le métier, le talent et les impôts

Lorsqu'on lui demandait ce qui l'avait poussé à faire l'acteur, il aimait à raconter qu'un jour, au cinéma, devant le film Rintintin, il s'était dit que si un chien pouvait faire ça, pourquoi pas lui ?



La fille qui n'a jamais réussi à t'oublier

Jesse Koska
- Il faut que je te raconte un truc qui m'est arrivé, mais ça va t'énerver.

- Raconte !

- Je ne sais pas comment faire.

- Rien que ça, ça m'énerve.

- Pourquoi ?

- J'imagine le pire.

- Par exemple ?

- Vas-y !

- C'est quoi, le pire que tu imagines ?

- T'es vraiment tordu !

- Mais non. Il m'est arrivé un truc assez déstabilisant... Et je veux être honnête et te le raconter, c'est tout.

- Qu'est-ce que tu es énervant !

- Tu vois ?

- Ne dis rien, je préfère ne rien savoir, bonne nuit.

- Ah bon ?

- Ben oui : t'es là, à tourner autour du pot, "c'est déstabilisant, je sais pas comment te le dire, tu vas t'énerver"... T'es un pervers ! Et tu te marres, en plus !

- C'est toi, qui me fais rire !

- Ah ! Je te déteste !

- Arrête !

- Ben raconte, alors !

- Voilà, j'ai reçu une carte postale aujourd'hui.

- De qui ?!

- Une fille qui écrit juste : "Je serai toujours à toi", un truc comme ça.

- Mais c'est moi qui te l'ai envoyée, patate !

- Oh, non !

- Tu es déçu !

- Je sais bien que c'était toi !

- Non, tu as cru que c'était une autre fille !

- Mais, non, j'ai reconnu ton écriture !

- J'entends, au son de ta voix, que tu es déçu !

- Tu ne comprends rien : je voulais te faire une blague !

- Tu as fantasmé toute la journée sur cette fille qui n'a jamais réussi à t'oublier...

- C'est toi, la patate ! Je pensais que tu allais jouer le jeu, en pensant que je n'avais pas compris et me laisser raconter ce trouble... C'était ça, ma blague !

- N'importe quoi ! Tu es déçu, je le sens.

- La seule déception, c'est d'avoir mal préparé ma blague !

- Tu étais tout émoustillé. Enfin, de la nouveauté !

- Que tu es bête !

- Et ce soir, dans ton lit, c'est la même que toutes ces années !

- T'es pas bien, non ? Vivre avec toi fait de moi l'homme le plus heureux du monde.

- Et là, t'essaies de te rattraper, t'es pitoyable, mon chéri.

- Je n'ai rien à rattraper !

- Je sais, c'est évident : tu as voulu faire cette blague parce que tu y as cru avant de comprendre que c'était moi qui t'avais envoyé cette carte !

- C'est moi qui suis tordu, t'es sûre ?

- Si tu as pensé à faire cette blague, c'est parce que le trouble a existé, et certainement davantage !

- T'es cinglée !

- T'as qu'à l'appeler, l'autre ! Elle doit être très équilibrée puisqu'elle veut se donner entièrement à toi...

- Bon, bonne nuit !

- C'est ça, fais de beaux rêves !

 

samedi 17 janvier 2015

Sous les grosses machines, Brooklyn

L'époque n'est peut-être plus à l'expérimental, le collectif, l'indépendance et l'artisanat. Surtout au cinéma. 
Mais l'époque est au financement participatif. 
Un film autoproduit, 100% hip hop, dont il a été question ici, a besoin du soutien de tous pour exister en salles au printemps prochain. Rien que trois dizaines de milliers d'euros sont nécessaires pour que Brooklyn éclose.  
Si vous n'aimez pas la jeunesse, le rap old school, la banlieue est, et le vrai cinéma guérilla, allez vous faire foutre !
Autrement, c'est ici.

Obscur, maladroit et mauvais


Muerte en el olvido
Yo sé que existo
porque tú me imaginas.
Soy alto porque tú me crees
alto, y limpio porque tú me miras
con buenos ojos,
con mirada limpia.
Tu pensamiento me hace
inteligente, y en tu sencilla
ternura, yo soy también sencillo
y bondadoso.                         

Croix du Sud

Bien plus discret que le frangin, plus fragile, Julien Baer teinte ses chansons entêtantes de rythmes afro-brésiliens, aurait pu être chantre des bobos, préfère prendre le temps pour nous chanter notre époque en mode mélancolique, comme ici, vers 1997, déjà...



vendredi 16 janvier 2015

Au cinéma ce soir

Dans le monde d'avant, une émission de télévision a contribué à me faire aimer le cinéma. Les reportages étaient tournés en pellicule, les séquences avaient la durée d'une bobine 16 mm., peu de montage, donc de manipulation, de censure, de pensée politiquement correcte. C'était avant les making-of javelisés. Je me souviens avoir vu ce numéro de Cinéma, cinémas. Je me demande si j'ai bien saisi alors la chance qui était la mienne. 
Ici, Pialat joue un peu à Pialat devant les caméras, Depardieu est intenable, comme toujours, mais tous deux se montrent généreux, attentionnés, déconneurs, loin de l'image d'eux colportée par la doxa. Loin aussi, Pialat, de tous ces réalisateurs d'aujourd'hui, casque sur les oreilles et yeux fixés sur le moniteur, coupés des hommes et des femmes qu'ils dirigent. Pialat se tient au milieu de son équipe, s'efface, bouscule les autres quand ça ronronne, se fout du bruit pendant les prises, attend la vie et surtout savoure. Depardieu est un monstre, on le sait, mais pas que pour son physique. Il l'est car naturel, spontané, ingénu parfois, dans une certaine vérité, sincère, bosseur, un gamin d'une présence magnifique. 
A l'heure de la soupe médiatique quotidienne, sans saveur et seule soucieuse du SAV selon les clauses de contrat des VRP, revoir ces images permet de mesurer ce que l'on a perdu. 




jeudi 15 janvier 2015

N'oubliez pas de rire !

Histoire de me changer les idées, de retrouver un peu de légèreté, j'irais bien au cinéma. Voir un film français par exemple. Une comédie, tiens. Qui nous parle de notre époque, avec le décallage suffisant, original, pour en rire, y voir plus clair. Je cherche et je m'aperçois que dans les semaines à venir, je vais avoir le choix. Je me demande même si je ne vais pas tout enchaîner. 
Cette histoire de pédé qui se découvre hétéro la veille de son mariage pour tous a l'air grave bonne.
 


Et que dire de ces jeunes quadras sur le point de divorcer et s'occuper enfin un peu de leur moi, obligés de se battre pour... ne pas avoir la garde des enfants ? 
 

Sans oublier, après la famille qui nous a foncé dessus le mois dernier, ce nouvel hommage au 13 heures de Jean-Pierre Pernaut, avec le concours d'un grand historien et du discret sociétaire de la Comédie française...
 

Il faut le reconnaître, depuis la convergence des médias, publics et privés, plus belle est la vie sur tous nos écrans !

mercredi 14 janvier 2015

Où est Charlie ?

- Ils l'avaient plus.
- Moi, j'en avais commandé deux. Je les avais même payés !
- Il en avait demandé 60 mais n'en a reçu que 40.
- Il m'a dit de repasser demain.
- Moi, j'ai acheté Le canard enchaîné à la place. Ils ont reçu des menaces, eux aussi.
- Il l'avait noté, que t'avais payé ?
- Non, mais il m'a proposé de me rembourser.
- Tu l'as trouvé, toi ?
- Je ne l'ai pas cherché.
- Ah ouais... Moi, j'ai été chargé d'en acheter un pour une copine au Canada, et de le lui envoyer. Je suis passé ce matin, la boutique n'était pas encore ouverte et il y avait une de ces queues devant, incroyable, jamais vu ça.
- Tu l'achetais, avant ?
- Non, j'avoue, jamais.
Ensuite, ils s'en sont pris à la nouvelle femme de ménage. Ils ont exigé que l'aspirateur soit passé avant notre arrivée au bureau. Une fois qu'on est là, c'est vraiment pas possible ! 
J'ai filé à mon poste, ai allumé l'ordi, posé les écouteurs sur le crâne, ne plus les entendre! 
Je sais qu'ils ne m'aiment pas. Pour ça. 
C'est bien de ne pas être aimé par des cons.

La Suède, le cinéma, Dostoievski et moi

mardi 13 janvier 2015

Qui est Charlie ?

Slogan en catalan dimanche dernier, lors de la rencontre FC Barcelone-Atlético de Madrid
A propos du slogan ayant fait le tour du monde en deux clics, je me permets de mentionner ici le texte de l'intervention de l'économiste-philosophe ex-atterré, Frédéric Lordon, hier, lors de la soirée La dissidence, pas le silence !, organisée par le journal Fakir à la Bourse du travail de Paris.

Lorsque le pouvoir de transfiguration de la mort, ce rituel social qui commande l’éloge des disparus, se joint à la puissance d’une émotion commune à l’échelle de la société tout entière, il est à craindre que ce soit la clarté des idées qui passe un mauvais moment. Il faut sans doute en prendre son parti, car il y a un temps social pour chaque chose, et chaque chose a son heure sociale sous le ciel : un temps pour se recueillir, un temps pour tout dire à nouveau.

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De la démocratie, suite

Il aura donc fallu ces drames et la mobilisation hystérico-médiatique pour que la triste réalité de ce pays éclate au grand jour...