Ce matin, mes collègues s'esclaffaient à propos, si j'ai bien compris, d'une émission de télévision diffusée hier. Je me suis tenu en retrait, presque honteux de ne pouvoir participer à leur joyeux forum, et bien plus de ne rien comprendre à leur bonheur. Il m'arrive pourtant fréquemment de connaître ce genre de situation embarrassante. Mais j'ai du mal à m'y habituer. Vivre sans télévision fait de vous un être bizarre, à part, arrogant, voire raté. Impossible d'argumenter, d'expliquer qu'il ne s'agit là aucunement de snobisme, d'une étrange pathologie psychiatrique ou gauchiste, mais plus simplement d'un besoin de respirer, de prendre un peu de distance, de nettoyer ses derniers neurones, et de consacrer le temps qui reste à la lecture et un peu à l'écriture. C'est peine perdue. Un seul remède pour être un jour de nouveau accepté au sein de la communauté, la culpabilité. Il va pourtant falloir que chemin se fasse avant qu'un soir madame Columbo me voit débarquer tout sourire avec sous le bras un écran plat à la place d'une cagette de fruits vide dédiée à l'alimentation de notre poêle à bois. Car pour le moment, mes longues soirées d'hiver, je les passe à regarder le feu.
J'aime avoir devant le poêle, encore habillé, quelques lectures que je ne peux avoir une fois à poil et au lit : une poignée de blogs devenus indispensables à une certaine illusion de stimulation de l'esprit, d'ouverture, par exemple. Ou encore mes sites de foot préférés ainsi que quelques journaux généralistes, le suvol forcément rapide de ces derniers étant la condition sine qua non d'une nuit paisible. La plupart des informations, celles dont je pourrais parler avec mes collègues par exemple, produisent en moi un accès de fatigue inextricable à peine leur lecture hypnotique entamée. A quoi bon perdre mon temps avec de telles inepties ?
Je me souviens ainsi être l'autre jour tombé sur un billet de Mme. Angot (pas le personnage du théâtre de Maillot, non, l'autre, la pâle imitatrice de Duras). C'était dans le moribond Libération du triste Laurent Mouchard dit Joffrin. L'auteur jadis à succès y faisait état de son état dépressif, consacrant sa chronique à... l'inutilité des chroniques vu que Marine Le Pen s'apprête à diriger le pays. J'ai ri intérieurement, histoire de ne pas réveiller le chien de la fille de Mme. Columbo mais aussi parce que ce que je lisais n'était pas censé être drôle, et suis passé à autre chose. Cette pauvre femme aurait certainement mérité un peu plus de bienveillance et de compréhension, elle qui pensait pouvoir changer le monde en écrivant tous les quinze jours dans un journal de gauche. Mais je suis resté déconcerté par la naïveté affichée - sorte de nouvelle pose mondaine ? Angot se demandait d'ailleurs comment ledit Joffrin faisait pour pondre un édito tous les jours. C'est une question de transit, Christine, ne cherchez pas plus loin, avais-je envie de lui répondre. N'ayant jamais lu la prose de cette pasionaria du 3e, je ne me permettrai pas de gloser sur son style aussi raffiné que la roulette du dentiste de mon enfance ou sur son petit monde qui, sans vouloir être médisant, me semble habituellement limité au nord par son estomac et au sud par son pubis - on me souffle à l'oreille que cette dernière frontière n'a jamais existé, je le note. Et lorsque madame en gros découvre, par la grâce de Mouchard et de toute la gauche bien pensante, le monde tel qu'il va ou qu'elle croit qu'il va après l'avoir aperçu à la télévision ou débattu avec ses amis, je ne peux que m'en désoler pour elle, sans parvenir, cependant à m'en émouvoir. Un coup de tonnerre, j'imagine, a secoué le petit milieu éditorial parisien lors de cette délicieuse intervention : trop écoeurée par son inutilité, Angot annonce renoncer à l'avenir à ses chroniques... M'en remettrais-je ?
L'autre fatigue incommensurable de la semaine fut cette petite vidéo trouvée sur le journal des marchés - dit Le Monde. Il y est question du bestselleriste Eric Zemmour et de son ancien employeur, le comique troupier Laurent Ruquier. Le navrant Havrais s'emporte désormais contre les idées réactionnaires, voire totalement frontistes, du journaliste-écrivain-polémiste multicartes qu'il a lui-même contribué à faire connaître en l'exposant tous les samedis soirs durant cinq ans ! L'animateur-dramaturge-parolier-écrivain dont la gloire et la fortune se sont constituées sur le dos du service public prétend aujourd'hui regretter d'avoir donné la parole au nabot-suppôt de La Pen. Ja ja ja, comme on dit au pays de mes parents... C'est que les échéances électorales approchent et qu'il faut, aux côtés du sinistre PS, voire de l'UMP, faire barrage au FN. Cette mobilisation vaut bien un petit mea culpa en faux direct, sous les applaudissements orchestrés par un chauffeur de salle, au nom de l'esprit du 11 janvier et de la défense de la République, aussi grotesque que cela puisse paraître.
Je me souviens ainsi être l'autre jour tombé sur un billet de Mme. Angot (pas le personnage du théâtre de Maillot, non, l'autre, la pâle imitatrice de Duras). C'était dans le moribond Libération du triste Laurent Mouchard dit Joffrin. L'auteur jadis à succès y faisait état de son état dépressif, consacrant sa chronique à... l'inutilité des chroniques vu que Marine Le Pen s'apprête à diriger le pays. J'ai ri intérieurement, histoire de ne pas réveiller le chien de la fille de Mme. Columbo mais aussi parce que ce que je lisais n'était pas censé être drôle, et suis passé à autre chose. Cette pauvre femme aurait certainement mérité un peu plus de bienveillance et de compréhension, elle qui pensait pouvoir changer le monde en écrivant tous les quinze jours dans un journal de gauche. Mais je suis resté déconcerté par la naïveté affichée - sorte de nouvelle pose mondaine ? Angot se demandait d'ailleurs comment ledit Joffrin faisait pour pondre un édito tous les jours. C'est une question de transit, Christine, ne cherchez pas plus loin, avais-je envie de lui répondre. N'ayant jamais lu la prose de cette pasionaria du 3e, je ne me permettrai pas de gloser sur son style aussi raffiné que la roulette du dentiste de mon enfance ou sur son petit monde qui, sans vouloir être médisant, me semble habituellement limité au nord par son estomac et au sud par son pubis - on me souffle à l'oreille que cette dernière frontière n'a jamais existé, je le note. Et lorsque madame en gros découvre, par la grâce de Mouchard et de toute la gauche bien pensante, le monde tel qu'il va ou qu'elle croit qu'il va après l'avoir aperçu à la télévision ou débattu avec ses amis, je ne peux que m'en désoler pour elle, sans parvenir, cependant à m'en émouvoir. Un coup de tonnerre, j'imagine, a secoué le petit milieu éditorial parisien lors de cette délicieuse intervention : trop écoeurée par son inutilité, Angot annonce renoncer à l'avenir à ses chroniques... M'en remettrais-je ?
L'autre fatigue incommensurable de la semaine fut cette petite vidéo trouvée sur le journal des marchés - dit Le Monde. Il y est question du bestselleriste Eric Zemmour et de son ancien employeur, le comique troupier Laurent Ruquier. Le navrant Havrais s'emporte désormais contre les idées réactionnaires, voire totalement frontistes, du journaliste-écrivain-polémiste multicartes qu'il a lui-même contribué à faire connaître en l'exposant tous les samedis soirs durant cinq ans ! L'animateur-dramaturge-parolier-écrivain dont la gloire et la fortune se sont constituées sur le dos du service public prétend aujourd'hui regretter d'avoir donné la parole au nabot-suppôt de La Pen. Ja ja ja, comme on dit au pays de mes parents... C'est que les échéances électorales approchent et qu'il faut, aux côtés du sinistre PS, voire de l'UMP, faire barrage au FN. Cette mobilisation vaut bien un petit mea culpa en faux direct, sous les applaudissements orchestrés par un chauffeur de salle, au nom de l'esprit du 11 janvier et de la défense de la République, aussi grotesque que cela puisse paraître.
Je crois qu'à côté de mes lectures plus sérieuses, si j'étais courageux, j'accorderais définitivement toute mon attention à la vie des produits de la téléréalité qui font et défont l'actualité. C'est autre chose que ce cirque politique ! Je pense sincèrement qu'ils nous racontent parfaitement notre monde absurde, bien plus que n'importe quel best-seller. Au cours de mes navigations de ces derniers jours, je suis tombé sur une photo de l'un des premiers produits-vedettes de ces émissions, cette pauvre Loana, physiquement métamorphosée par la violence de la grande parade médiatique, le cyclone sur elle abattu la faisant passer du statut enviable de bimbo du moment à celui d'une has-been dépressive et sous cachets, en proie aux paparazzis-vautours en mal de sensationnalisme. Je ne connais rien de sa vie, mais j'ai l'intuition qu'il y a dans son parcours bien plus de fiction que dans toute l'oeuvre d'Angot et une certaine ressemblance avec La Pen.
Pour me donner une contenance, j'ai demandé ce matin à une de mes collègues ce que devenait le clone brun 3.0 de Loana, la nerveuse Nabilla, accusée d'avoir poignardé, s'en souvient-on ?, son collègue-compagnon. Ma collègue m'a affirmé s'en foutre royalement. Ma réhabilitation n'est pas pour demain...
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