jeudi 9 juillet 2015

Le temps qu'il fait


Elle descendait la rue, l'appareil collé à l'oreille, les yeux embrouillés par les larmes et les paroles de l'autre. 
Je vais te dire un truc, je ne sais pas si tu peux le comprendre avec ta petite tête, mais tout ce que j'attends d'un homme, eh bien, moi, j'y ai jamais droit !
*** 
Ils étaient assis sur un banc du parc et regardaient devant eux. C'est lui qui gueulait.
Tu ne me parles pas comme ça ! Tu te couches le soir, sans un mot, quand tu me parles, c'est pour me gueuler dessus, le matin, les premières paroles, pareil. Je ne sais pas moi, essaie de faire passer ta frustration sur quelqu'un d'autre, moi j'ai eu ma dose, ce genre de vie ne m'intéresse pas, viens courir ici tous les matins, va sculpter tes fesses, va à la piscine, ça rouvre la semaine prochaine, prends un chien et gueule-lui dessus, prends un amant et éclate-toi, mais fous-moi la paix une bonne fois pour toutes !
J'ai tiré le chien vers moi, l'ai sermonné un moment sur ses manies d'aller bouffer n'importe quoi et les ai laissés à leur bonheur d'un soir d'été. 

***
Ces derniers jours, j'avais l'impression de croiser un peu trop de femmes en pleurs dans la rue. Des jeunes et des moins jeunes. La canicule suivie d'une chute des températures ? Le Grexit ? Un virus ? Des vacances annulées au dernier moment ? La vision du dernier film de Desplechin ? Le krach boursier chinois ? Casillas sur le point de quitter le Real ? L'arrivée des programmes d'été sur leur chaîne préférée ? Un prêt bancaire refusé ? Le début des festivals en plein air ? Non, vraiment, je ne trouvais aucune explication. Je me demandais alors si je n'y étais pas pour quelque chose. 

*** 
Ils avançaient tordus, luttant contre le vent et leurs vieux os mal faits, se tenant comme ils le pouvaient l'un à l'autre. Je ne sais pas lequel des deux était le plus à plaindre. Ils avaient vécu toute leur vie d'adulte ensemble et la quitteraient simultanément. Un vrai spectacle. En passant devant moi, elle m'a regardé.
Il me dit, mon mari : tu vois pas le temps qu'il fait ? Bien sûr que je le vois. Bien sûr que moi, je le vois, le temps qu'il fait !
 Je lui ai souri et fait signe au serveur de remplir mon verre. 

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