lundi 17 avril 2017

Le refus de parvenir


De temps en temps, une villa entourée d'une grille, les volets clos, apparaissait sur un côté de la route. Toute une humanité vivait là en permanence, insipide et fière dans sa retraite. Serag se demandait ce qu'ils pouvaient comploter entre ces murs, enfouis dans leur vie mesquine comme des rats au fond de leur trou. Quelle dérisoire abjection ! Et c'était ainsi partout autour de lui. Est-ce qu'il ne sortirait jamais de cette immense duperie, de cette fange stagnante ? Il devait bien exister quelque part un monde composé de vivants et non de cadavres pétrifiés. Mais où était-il ce monde ?


C'est Rodolphe Christin qui cite Albert Cossery (Les Fainéants de la vallée fertile, 1948), dans son excellent ouvrage Le Désert des ambitions, avec Albert Cossery, publié cette année par les non moins excellentes éditions de l'Echappée. Essai en deux parties autour de la conception de l'existence de l'auteur égyptien – qui refusa la Légion d'honneur en 2008 –, les préceptes tirés de son œuvre, une réflexion sur nos sociétés soumises au sortilège de l'accumulation matérielle et de la productivité. Une sorte de manuel qui devrait nous permettre de parvenir au refus de parvenir, seule ambition louable pour tout être humain qui se respecte. Un petit bouquin à 14 euros – ou à voler – indispensable par les temps qui se liquéfient. 

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