Dans des milliers de berceaux des milliers de bouches pompent des sucettes, sur des lits des milliers de bouches pompent des sexes, des milliers d'enfants naissent, des milliers d'enfants meurent de faim, des milliers de grands enfants souffrent dans les hôpitaux. Des milliers de poitrines tombent sous la mitraille, des milliers d'êtres retournent à la terre, la Terre tourne avec ses millions d'enfants, ses milliards d'hommes et de femmes… Des corps dans des mines, des usines, dans des soutes et des casernes, dans des prisons et dans des comptes courants. Des corps qui se lèvent, qui se lavent, qui boivent, entassés dans le métro, dans le tram, qui s'engouffrent dans des ateliers, des banques, des vies qui s'annulent dans les moyens d'existence de vies qui n'existent pas. Des millions de mains qui lessivent, qui pansent des plaies, qui tuent, qui prient, qui caressent, qui font du pain, qui se dressent vers le ciel, qui fouillent la terre, qui ensevelissent les morts…
Gaston Criel, L'Os quotidien, 1987,
rééd. Les éditions du sonneur, 2017
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