Julian Wasser via Kvetchlandia |
un poème est une ville remplie de rues et d’égoutsremplie de saints, de héros, de mendiants, de fous,remplie de banalité et de bibine,remplie de pluie et de tonnerre et de périodes desécheresse, un poème est une ville en guerre,un poème est une ville demandant à une horloge pourquoi,un poème est une ville en feu,un poème est une ville dans de sales drapsses boutiques de barbier remplies d’ivrognes cyniques,un poème est une ville où Dieu chevauche nuà travers les rues comme Lady Godiva,où les chiens aboient la nuit et chassentle drapeau ; un poème est une ville de poètes,la plupart d'entre eux interchangeables,envieux et amers…un poème est cette ville maintenant,à 80 kilomètres de nulle part,à 9H09 du matin,le goût de l’alcool et des cigarettes,pas de police, pas de maîtresses, marchant dans les rues,ce poème, cette ville, fermant ses portes,barricadée, presque vide,mélancolique sans larmes, vieillissante sans pitié,les montagnes rocheuses,l’océan comme une flamme lavande,une lune dénuée de grandeur,une petite musique venue des fenêtres brisées…un poème est une ville, un poème est une nation,un poème est le monde…et maintenant je colle ça sous verrepour que l’éditeur fou l'examine de près,et la nuit est ailleurset les dames grises indistinctes font la queue,les chiens suivent les chiens vers l’estuaire,les trompettes font pousser les gibetstandis que de petits hommes enragent contre des chosesqu’ils n'arrivent pas à faire.
Charles Bukowski, Les jours s'en vont comme des chevaux sauvages dans les collines,
trad. Thierry Beauchamp, éd. du Rocher
trad. Thierry Beauchamp, éd. du Rocher
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