Nous avons été à ce point dominés, écrasés, possédés par la réalité, par le monde, que nous avons fini par être chassés de ce monde : notre roman se réfugie dans le fantastique, dans le bizarre, dans le maniérisme, dans le refus de voir, d'aborder, de se battre, d'affronter, il fuit dans le formalisme, dans l'informe, dans l'informel et dans l'informulé. Et lorsque même ces dérobades ne permettent pas au romancier de se libérer de sa terreur du réel, il cherche alors à se libérer du roman lui-même : il annonce « la mort du roman », cette euthanasie.
Nous avons été piétinés, mutilés, réduits en bouillie par la Puissance, avalés et digérés par la réalité pour être ensuite éliminés sous forme de spécimens littéraires, simples signes cliniques de notre semi-existence terrorisée : la création littéraire n'est même plus un « conditionnement », c'est une défécation sous l'effet de la torture.
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