samedi 30 avril 2016
vendredi 29 avril 2016
Jeu de hasard
La littérature pratiquée comme une profession fait paraître le pari aux courses de chevaux comme une occupation solide et stable.John Steinbeck
mercredi 27 avril 2016
Le flamenco de Paris
Il y avait toujours un de ses potes qui finissait à la maison. Enfant, j'avais l'impression que ça ne désemplissait jamais. Ils passaient pour l'apéro, venaient déjeuner, prendre un café, rarement dîner. Notre deux-pièces-cuisine était constamment enfumé et ma sœur, mon frère et moi tentions d'y échapper en nous réfugiant dans notre chambre commune ou dans la cour de l'immeuble. Les Javanais de mon père, tous dans le bâtiment, venaient d'Espagne, du Portugal, d'Italie, de Pologne, et d'ici, il y avait même un Chinois assez imposant, ancien catcheur, qu'on apercevait parfois dans des scènes de films campant un milieu populaire ou le milieu tout court.
Miguel était le plus présent. Dans mon souvenir, El Maño (L'Aragonais) est le sosie de Lino Ventura, une bête. Sa femme portait le même prénom que ma mère, plutôt rare. Ils débarquaient très souvent le samedi matin. Après le café, les hommes filaient au bar du coin et les femmes commentaient les journaux du week-end, France dimanche ou Ici Paris, parfois Détective. Je ne sais plus quels jeux nous pouvions bien partager avec leurs filles plus jeunes que nous. Elles voulaient jouer à la maîtresse, mais c'était moi qui prenait d'autorité le rôle de l'instit pour ainsi me délecter des séances de fessées déculotées. Miguel et Flora habitaient à dix minutes de la maison, dans un quartier aujourd'hui gentrifié. Leur bicoque, située derrière le bar-tabac-tiercé tenait encore debout par une sorte de miracle. Elle fut rasée et ils devinrent les heureux premiers locataires d'un HLM de la cité de La Noue qui, à la fin des années 1960, constituait un pas de géant vers l'envié confort-standard de la classe ouvrière. Enfants, nous n'aimions pas trop nous y rendre. Ces grands ensembles n'avaient pas encore été filmés par Jean-Claude Brisseau mais nous éprouvions déjà cette froide sensation de désespoir étouffant. El Maño roulait en 404 et sur la vitre arrière, à côté de l'autocollant J'écoute Europe1, un mot me fascinait, Cabourg. Proust n'y était pour rien. La mer à laquelle Miguel emmenait sa famille l'été venu me faisait rêver. A cette époque, nos vacances se déroulaient immanquablement chez ma grand-mère paternelle, dans un faux deux-pièces d'un quartier populaire de Madrid, infesté d'énormes cucarrachas noires, la chambre étant simplement séparée de la salle à manger par un rideau d'un vert atroce. Je n'ai connu la plage que vers l'âge de dix ans, lorsque ma mère loua un autre deux-pièces dans la Manche à cinq ou six kilomètres de l'eau rendue capricieuse et décevante par les marées et le climat hostile.Parmi les compagnons de la grappe de mon père, le fidèle Rafael était le parrain de ma sœur et le mari de la débridée Sévillane Manuela, dite Manoli. Contrairement aux autres Espagnols, rencontrés sur les chantiers parisiens, les bars de Belleville ou de la banlieue est, il me semble que Rafael et mon père s'étaient connus à Madrid. El Rafa et Manoli créchaient du côté d'Alfortville et nous squattions le dimanche leur deux-pièces-taudis-sur-Seine. L'expédition se faisait par le bus que nous allions chercher à Vincennes et que ma mère payait une fois sur deux, au risque d'une humiliation publique lorsque le gang des contrôleurs débarquait.
El Rafa prétendait être le sosie d'Alan Ladd et sa femme avait un air de Dalida. La chanteuse italo-égyptienne était d'ailleurs le centre d'intérêt du fils de Manoli qui aimait tout particulièrement le moment où l'interprète de Bambino jouait avec ses longs cheveux péroxydés. L'autre créature télévisuelle de ces dimanches au bord de l'eau était la grosse boule effrayante de la série Le Prisonnier, remplacée bientôt par les bottes de cuir d'Emma Peel. El Rafa et mon père disparaissaient généralement pendant la préparation du couscous, de la choucroute ou des boulettes, sous prétexte de faire le tiercé. Et n'hésitaient pas à se faire parfois porter pâles de toute la journée. 10-5-2, éternelle combinaison de mon géniteur, jamais gagnante, ne l'occupait pas plus de trois minutes, le temps d'attente pour se faire poinçonner le ticket. Et d'autres réjouissances avaient lieu devant ou derrière le zinc. Un nom est associé à ces lieux car traînant régulièrement sur la langue fielleuse des femmes : La Mona, dont la signification en castillan est gueunon. C'était le prénom, ou le surnom, d'une tenancière de bistrot qui, selon ce que j'en comprenais, se livrait à d'autres activités censées satisfaire les hommes. Il m'était arrivé d'aller chercher mon père dans ce bistrot et je fus rassuré de constater que La Mona était une femme laide et vieille, vraiment inoffensive. Je sentais que la crainte qu'elle suscitait chez nos mères cachait peut-être autre chose, incapable alors d'imaginer que des filles travaillaient pour elle à l'étage.
J'ai beaucoup cherché mon père dans cette banlieue. Une nuit, j'ai même été persuadé que je ne le reverrais plus jamais. Ma mère m'avait réveillé et entraîné par le dernier bus chez ces amis qui, comme nous, n'avaient pas le téléphone. El Rafa était absent et je nous revois parcourant les bistrots encore ouverts, et nous immobilisant sur un pont après la terrible découverte d'une voiture flottant sur le fleuve. Mon père n'a jamais eu son permis. Et, en dehors de Miguel, aucun de ses amis ne possédait de voiture. C'est ce que j'essayais de faire comprendre à ma mère en pleurs inconsolables.
El polonés correspondait bien à l'image simpliste que l'on peut se faire d'un immigré polonais, célibataire catholique endurci au pastis et aux alcools blancs. Ma mère lui trouvait une certaine élégance et sa disparition soudaine entretint longtemps son mythe. Da Cunha, lui, louait un studio du côté du marché de Montreuil. Portugais, il se disait Galicien pour être accepté dans la bande des espingoins et, certainement à cause de ces petits arrangements avec la réalité, n'avait droit à aucun sobriquet. Nous lui avions rendu visite après son improbable accident sur un chantier. Mon père, apparement ivre, avait laissé tomber un marteau qui atterrit quelques étages de l'échaffaudage plus bas, sur le nez du pseudo-gallego. Ma mère, qui entretenait de bons rapports avec la culpabilité, avait insisté auprès de mon père pour ce détour du dimanche matin. Pour moi, il ne faisait aucun doute, le nez fracturé avait été le prix à payer pour une bagarre avec mon père.
Celui qui frappait fort, c'était Castellanos. Je n'ai vraiment connu cet homme doux qu'au sortir de l'adolescence et peu avant sa mort. Cet ancien boxeur était revenu dans le clan sur le tard. En avait-il été exclu en raison de son âge plus avancé, de sa sobriété, ou de son adresse du côté de Jussieu où sa femme tenait une loge de gardienne ? Et qu'est devenu cet autre époux de gardienne, Chevalier ? Ce titi parisien exaspérait ma mère et nous amusait mon père et nous par sa sempiternelle sentence : « Ça qui compte, c'est les acomptes ! »
En classe de première, je crois, j'ai eu pour camarade Gentiane, la fille d'Antonio El Largo (Le grand). J'avais eu la bonne idée de me fracturer la cheville en jouant au foot dans la cour du lycée et la brave Gentiane, qui savait vaguement que nos pères avaient été amis mais s'étaient perdus de vue en raison des accointances communistes de son géniteur, avait eu pitié de moi et portait gentiment mon sac jusqu'à la maison me laissant fort mal m'escrimer avec mes béquilles. J'appris bien plus tard que ce que je prenais bêtement pour une bonté idéologique était clairement, aux yeux de tous mes camarades de classe, une tentative désespérée de mieux me connaître. J'ai le souvenir assez précis de l'enterrement de son père et de la froideur qu'elle montra alors à mon égard. Enterrés aussi El Rafa, quelques mois après mon père, vers 1993, Castellanos un peu avant, El polonés, Chevalier, et les autres que j'oublie ou dont le souvenir est désormais trop flou, tous partis les poumons malades des trop fréquentées salles de café enfumées mais aussi exposés aux produits et matériaux toxiques respirés à longueur d'année sur les chantiers.
Il m'arrive aujourd'hui, lorsque je vais acheter du bois de chauffage à Maisons-Alfort, de passer le cœur serré devant Le Petit Caporal, l'un de ces cafés où mon père et ses Javanais avaient leurs habitudes. Il abrite encore un hôtel et, si je ne me trompe pas, une certaine Mona y exerçait autrefois...
mardi 26 avril 2016
Point de vue images du monde
Je revoyais hier les images de l'expulsion gênante, pas finaude – mais compréhensible – d'Alain Finkielkraut de l'agora de la République, les sorties du gourou Lordon survolté à la Bourse du travail, le saccage policier d'un local syndical à Lille, et quelques autres tristes réjouissances de nos temps agités et souvent confus. Privé volontairement de télévision depuis bientôt dix ans, réfractaire aux réseaux sociaux, surfeur virtuel limité, allergique à la moraline, adepte du pipi dans le violon, me croyant épargné par le racolage spectaculaire politico-médiatique, je suis désormais rapidement écoeuré, au sens premier, par certaines visions de l'absurdité et de la violence de nos existences. Un collectif nommé DOC du réel, signalé par un ami, semble effectuer, avec une belle maîtrise de l'art du montage - par définition, subjectif - un travail salutaire pour remettre les choses en perspective et laver, un tant soit peu, nos esprits de la propagande de tous bords.
lundi 25 avril 2016
CQFD
En 1997, à la veille des résultats des législatives, Pierre Carles, futur réalisateur de Pas vu, Pas pris et de bien d'autres docus dénonçant la connivence entre journalistes et hommes politiques, suit pour l'émission Strip-tease Philippe Reinhard, ancien énarque devenu journaliste, notamment au Quotidien de Paris, et pote de certains politiciens comme Laurent Fabius (PS), Brice Hortefeux ou encore Jacques Toubon (RPR, à l'époque)…
Le temps de l'exercice est limité par le format de l'émission belge mais on y trouvait, disons, matière à réflexion…
Vingt ans plus tard, un "élève" de Carles, François Ruffin, créateur de Fakir, auteur entre autres des Petits Soldats du journalisme, est à l'origine, avec son film Merci Patron ! du lancement de Nuit Debout. CQFD.
Le temps de l'exercice est limité par le format de l'émission belge mais on y trouvait, disons, matière à réflexion…
Vingt ans plus tard, un "élève" de Carles, François Ruffin, créateur de Fakir, auteur entre autres des Petits Soldats du journalisme, est à l'origine, avec son film Merci Patron ! du lancement de Nuit Debout. CQFD.
vendredi 22 avril 2016
La mort viendra et elle aura tes fesses
Elle prétend que j'ai fait de sa vie un désert. Un désastre peut-être, je ne sais plus. Je ne veux pas la relire. Elle y tient : nous devons nous voir, prendre un café, parler. Je n'ai rien à lui dire. Il y a trente ans. Je me souviens à peine d'elle. Ses yeux, ses fesses, rien d'autre. Quel besoin a-t-elle de remuer notre jeunesse ? Elle déclare que je ne peux la laisser comme ça. Je ne sais pas ce qu'elle a en tête. Toi, tu as réussi ta vie, écrit-elle. Ce qui n'est pas son cas. Je dois l'aider. A la mémoire de l'amour, de nos idéaux. Que s'imagine-t-elle ? Que sait-elle de ma vie, de mes échecs, des rêves évaporés ? Nous n'avons jamais vraiment vécu ensemble. Nous étions des enfants. Nous fréquentions une bande d'anarchistes, improvisés éditeurs. Nous donnions un coup de main pour la relecture des textes, c'est là, dans un sous-sol humide, que nous nous sommes rencontrés. Un temps, nous avons été logés dans un squat mais j'ai très vite étouffé. L'amour libre, les soirées fumette et cannettes, le partage des tâches, les débats interminables, la castagne avec les fafs, les courses-poursuites avec la flicaille, les faux papiers, les petits chefs, les doigts dans la colle, l'eau froide…, le sens de la lutte m'échappait. Elle aussi. Aujourd'hui, elle supplie. Envie ma vie bourgeoise. Demande des comptes. Je ne vois plus personne de cette époque. Je préfère y penser avec nostalgie. Comment m'a-t-elle retrouvé ? Elle n'indique ni adresse ni téléphone. Elle dit qu'elle est prête à tout pour me revoir. Juste une demi-heure, une heure. Pas plus. Elle a des choses à me raconter, à me demander. Ce soir. Dans ce café où nous nous sommes embrassés pour la première fois. Je ne sais pas de quoi elle parle. Je n'ai jamais embrassé de fille dans un café.
jeudi 21 avril 2016
Au boulot, les feignasses !
Cette année, l'économie française devrait aller mieux. Grâce au printemps. Car en 2016, il y aura moins de jours fériés, moins de viaducs, donc plus d'employés au turbin, et davantage de productivité. C'est le Medef qui se frotte les mains, et ses laquais les plus fidèles composant la classe politico-médiatique.
Ça, c'était donc l'an dernier sur Nada-info.
La toute nouvelle livraison de Balbastre et ses potes, Les temps modernes, est un entretien, images à l'appui, avec l'économiste-philosophe Frédéric Lordon, un petit régal en deux parties.
mercredi 20 avril 2016
Foule sentimentale
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Andreas Gursky |
(…) Cette incohérence et cette confusion sont liées à un autre trait de l'individualisme : la primauté accordée à l'émotion et aux sentiments, considérés comme la marque d'une « authenticité » première et singulière qui s'érige en critère de vérité face à un monde des idées trompeur et impersonnel. Dans le débat public, l'expression émotionnelle a valeur d'autorité contre le travail intellectuel et les convictions sensées. Soupçonnées d'être une pure rationalisation et le masque d'une infrastructure sentimentale qui les détermine, ils sont déconsidérés au profit d'un « ressenti individuel » qui balaie tous les arguments. Les contradictions et les conflits, la confrontation des idées et des convictions sont réduits à des « histoires de personnes », à des « affinités » ou à des « animosités » où s'entremêlent désir de pouvoir, bons et mauvais sentiments. L'hégémonie sentimentale rabat tout sur le même plan et fait sauter les barrières entre vie privée et vie publique ; les affects débordent la sphère du privé, voire de l'intime, pour s'exhiber dans les médias, sur Internet et les réseaux sociaux.Cette expression débridée du vécu et du ressenti rompt avec une éducation ancienne pour qui la méfiance vis-à-vis de la part sauvage que l'homme porte en lui, la pudeur et la retenue, l'usage de la raison étaient considérés comme les principes régulateurs d'une morale indispensable au bien-vivre en société. A l'inverse, l'étalement public de la subjectivité fait peu de cas de la médiation du langage, de sa maîtrise et de l'usage de la raison. Elle s'affirme au plus près des affects et des pulsions en cherchant à attirer l'attention. Poussée jusqu'au bout, cette expression débridée aboutit à des comportements hystériques avec alternance de cris, d'agitation et de larmes dans les « moments forts » marqués par les succès ou les échecs personnels, les fêtes ou les drames. Les grands médias les mettent en scène et font de l'expression et du partage des émotions un modèle social de comportement. Emotions et sentiments deviennent ainsi des signes de reconnaissance et d'équivalence des individus qui les intègrent dans une même « foule sentimentale » et médiatique où ils sont amenés à communier dans l'émotion festive ou funèbre (…)Malgré les apparences, cet individualisme émotionnel et sentimental n'est pas si tolérant : il ne l'est que pour autant que l'autre lui ressemble ou le laisse vivre comme il l'entend. Persuadé que son comportement et son mode de relation aux autres incarnent le bien-vivre en société, il ne comprend pas et s'étonne que d'autres puissent penser et vivre autrement. Aussi a-t-il tendance à rejeter comme naturellement réactionnaire, arriéré et « ringard » tout ce qui vient contredire ses valeurs et son mode de vie particuliers (…) Le nouvel individualisme est en fait un « faux gentil » qui ne supporte ni la contradiction ni le conflit, non plus que le tragique inhérent à la condition humaine et à l'histoire. Il s'est construit un monde à part où il vit, se protège de l'épreuve du réel et se conforte avec ses alter ego (…)
En fin de compte, cet individualisme considère tout bonnement le monde et la société comme le prolongement de lui-même, de ses sentiments et de ses relations affectives. Les rapports sociaux et politiques ne sont plus insérés et structurés dans une dimension tout à la fois collective, historique et institutionnelle, mais réduits à des relations interindividuelles mues par de bons ou de mauvais sentiments (l'amour contre la haine), qu'il confond avec la morale ; il croit qu'il est possible d'éradiquer le Mal au profit du Bien qu'il incarne et d'une fraternité universelle d'individus semblables à lui-même.
Jean-Pierre Le Goff, Malaise dans la démocratie, Stock 2016
lundi 18 avril 2016
samedi 16 avril 2016
Départ dans la nuit
via Pop9
Je fredonnerai ce que tu veux devant la piscine
chanterai ce que je peux playback
façon Gainsbourg ahanant
façon Van ou son pote Zimmerman
surtout cuvant et vous genre Catherine
vous me suivrez en rimes à Thessalonique
je vous tripoterai en direct pour la frime
et tu me repousseras
discrètement résolument tragiquement
je serai sous ton balcon sans grand-monde une Gitane de mon père au bec mouillée
un dernier verre une dernière danse si j'ai de la chance
au nom du passé décomposé
allongé empalmé noyé reprise dévoilée
à la face du monde
vous n'y pourrez rien je ne penserai qu'à vous
c'est déjà beaucoup trop
juste pour être à toi
avant l'aube viendrai sans te réveiller
vous gueuler sous
les draps nous mettons les voiles
mes petits mots et moi
mardi 12 avril 2016
Phrases du jour (debout)
« La révolution de la transparence est partie, elle ne s’arrêtera pas »
Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et monétaires,
entretien accordé au quotidien vespéral des marchés
entretien accordé au quotidien vespéral des marchés
***
« L'argent est à tout âge l'instrument de la liberté »
Pascal Bruckner, ex-Nouveau philosophe,
entretien accordé au quotidien déténu par un député mis en examen pour blanchiment de fraude fiscale
***
« Ça ne me choquerait pas que demain, après 2017, il y ait des personnalités d'horizons différents qui travaillent ensemble »
Jean-Marie Le Guen, membre du PS,
secrétaire d'Etat chargé des Relations avec le Parlement, entretien dans le même torchon
***
« Ne soyons pas trop sages ! »Nuit debout
Rêve brisé
J'ai toujours eu envie de manger une truite de ruisseau
au petit-déjeuner.Soudain, je découvre un nouveau chemin
jusqu'à la cascade.Je presse le pas.
Réveille-toi,dit ma femme,
tu rêves.Mais quand j'essaie de me lever,
la maison bascule.Je rêve, moi ?
Il est midi, fait-elle.
Mes chaussures neuves attendent près de la porte,
lustrées.
Raymond Carver, En recherche d'emploi, in Poésie,
trad. Jacqueline Huet, Jean-Pierre Carasso et Emmanuel Moses,
éd. L'olivier, 2015
lundi 11 avril 2016
samedi 9 avril 2016
A la bourre
J'arrivais trop tard
comme toujours
à peine éveillédénudé d'intérêt livré àla blouse blanche
sans défense
comme à la naissanceje n'ai pas osé hésiter
pour qui j'me prendssont allés voir dedansrien à faire circuleztrop tardcomme toujoursJe secouais encore le ventregardez ça pour vous
trop gros trop malrien à voir avecce qu'on sait faire icitrop tard
il a refermé
le sang qui pissegardez-vous présenterles larmes ne sertà rien trop tardcirculez circulez
pour qui il s'prendchhhhhtong gné froutJ'ai lâché quelquesonomatopées de traversrestez positif on vous ditj'étais déjà repartià la bourre
comme jamais
pas encore réveillé
jeudi 7 avril 2016
Le temps de vivre
Ô paresse, prends pitié de notre longue misère ! Ô paresse, mère des arts et des nobles vertus, sois le baume des angoisses humaines !
Paul Lafargue
mardi 5 avril 2016
Rencontre au sommet (en VO)
Pour hispanophones seulement, cet entretien avec Ignacio Ramonet, mené par Pablo Iglesias dans son émission Otra vuelta de tuerka (Un nouveau tour de vis). Face au leader de Podemos, l'ancien directeur du Monde diplomatique revient sur sa biographie, ses engagements naturels, les crises économique et politique de nos sociétés, avant de trinquer pour la victoire de la gauche en Espagne. Notons au passage qu'il se garde bien d'évoquer ses années de chanteur, mais n'oublie pas de faire la promo de son dernier bouquin sur la surveillance de masse. Sacré Ignacio !
dimanche 3 avril 2016
Irrémédiable sentimentalisme
Il a fallu peu. Pas grand-chose. Un état d'angoisse vite habité, sans visa ni carte de séjour. A l'ancienne. Pas fier pour autant d'y être entré. Une série faite de malentendu, coïncidence, confusion, doute, remémorance rance, rebondissement, prévision, trou noir, à suivre, saison 50.
J'écoute ce disque emprunté à la médiathèque, comme à 18 ans. Seul cette fois. En cachette presque. Peur d'être déçu, espoir de ne pas reconnaître, encore une fois, ce garçon romantique, naïf et niais que je fus. La mélodie légère et étrangement mélancolique m'accompagne depuis. Et depuis, je ne cesse de m'interroger. Quel désespoir inconscient trainais-je alors pour adhérer sans retenue ni honte à ces voix mielleuse et guitare de colonie de vacances consolatrices ? Est-ce cette nouvelle confusion sentimentale qui me persuade que cette Chanson de Vivaldi sonne aussi juste qu'une toccata de Bach ou une impro de Coltrane ?
La vérité si j'écris
D'un doigt dégoûté, je fais défiler le site du canard libertaire-libéral, jadis fondé par Sartre et détenu aujourd'hui par le groupe Altice et son charmant dirigeant Patrick Drahi, et que vois-je soudain dans cette forêt d'inepties ? Oui, cette chère Annie Ernaux, herself, en tournée des popotes pour la sortie de son dernier bouquin. Je lis donc un entretien aux questions plus stupides les unes que les autres et sauvegarde de la dernière réponse de cette vénérée dame de 75 ans – n'en déplaise à certains –, ces quelques phrases que je vais passer la nuit à méditer…
Quand on écrit, on tombe tout de suite dans un marché. Je suis frappée par le désir de certains jeunes auteurs, très pressés d’être reconnus, d’exister. Tous ces textes mis sur Internet, un phénomène qui se répand, je ne suis pas sûre que ce soit une bonne méthode. Vous trouvez toujours des gens qui vous disent que c’est bien, alors vous êtes content. On ne va pas jusqu’au bout de sa propre vérité, qui peut d’ailleurs être dans l’imaginaire.
Si je ne réapparais pas d'ici une semaine, c'est que je suis parti chercher ma vérité, dans l'imaginaire ou ailleurs… Merci Annie !
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