lundi 16 novembre 2015

Nos morts



Au terme de ces trois jours de deuil national, décrétés par un état hypocrite se découvrant soudain en guerre, et devant la confusion des esprits entretenue par les grands médias, nos hommes politiques et le triomphe de la bêtise, je me permets de citer ce texte de Julien Salingue, écrit en janvier dernier et revisité après les terribles tueries de vendredi soir. Avec lui, il est bon de rappeler, tout en respectant la mémoire des victimes et la douleur des familles, qu'un pays comme la Syrie, grâce en partie à nos sociétés occidentales, vit ce genre d'horreur au quotidien. Et que Daech n'est pas dirigé par un groupe de fous furieux, mais que son origine est bel et bien politique, que ses actes, aussi discutables et condamnables soient-ils, sont avant tout politiques.

L’une des causes de la sidération qui a touché de larges secteurs de la population, y compris les cercles militants, est la (re-)découverte de cette vérité : oui, la France est en guerre. Une guerre qui ne dit pas toujours son nom, une guerre dont on discute peu dans les assemblées, dans les médias et plus généralement dans l’espace public, une guerre contre des ennemis pas toujours bien identifiés, une guerre asymétrique, mais une guerre tout de même. Les récentes tueries l’ont rappelé de manière brutale à qui l’ignorait, refusait de le voir ou l’avait oublié : la France est en guerre, la guerre fait des morts, et les morts ne se comptent pas toujours chez l’adversaire.
Contre qui la France est-elle en guerre ? Selon les discours et les périodes, contre le « terrorisme international », contre le « jihadisme », contre la « barbarie intégriste », etc. Ce texte n’a pas vocation à discuter de ces dénominations imprécises, des généralisations abusives qu’elles impliquent et des paradoxes qu’elles sous-tendent (alliances à géométrie variable, soutien à des régimes dont les politiques favorisent le développement des courants « jihadistes », participation à des interventions militaires qui renforcent ces courants, etc.). Il s’agit plutôt de souligner que la France a, en réalité, emboîté le pas aux États-Unis de George W. Bush dès septembre 2001 (guerre en Afghanistan, législation « antiterroriste ») et fait sienne, sans toutefois le dire, la rhétorique et la politique du « choc de civilisation ».
Voilà près de 14 ans que la France était en guerre sans l’assumer.

4 commentaires:

  1. Ceci est tout aussi pertinent que le dessin de circonstance. Merci.

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  2. Merci à Julien Salingue ! Difficile autrement d'y voir clair dans le spectacle immonde qui suit ces actes odieux...

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    1. Texte effectivement pertinent. Un autre, glané sur Médiapart, qui rappelle, là-aussi, que cette "guerre" ne vient pas de nulle part et trouve ses origines, entre autre, dans des intérêts géo-économiques bien compris.

      http://blogs.mediapart.fr/blog/frederic-lutaud/161115/non-nous-ne-sommes-pas-en-guerre

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    2. Cher Promeneur, merci pour ce lien. Texte intéressant en effet (malgré les nombreuses fautes d'Aurtaugrafe). A méditer aussi : http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2015-11-16-Paris

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