vendredi 5 mars 2021

Que l'on me dise enfin ce que je suis

Mark Kauffman

 

En 1953, Henri Calet participe au colloque de Cerisy. Sa déclaration sera publiée en septembre 1956 dans La Nouvelle NRF, soit deux mois après la mort de l'auteur du Tout sur le tout. Pour ceux qui ont égaré ce numéro, rendez-vous le 11 mars pour la parution de Je ne sais écrire que ma vie aux PUL, qui reprend donc ce texte fondamental et poignant.  Extrait:

(...) Je suis pris à l'intérieur d'un système dont je ne pourrai jamais plus sortir, prisonnier, tout de même que l'araignée de sa toile, où je trouve ma nourriture et ma délectation.
On dit, entre autres choses : littérature d'évasion... J'en suis, si cela signifie que l'auteur en est le tout premier bénéficiaire... Evasion pour mon compte d'abord... S'évader du monde pour tomber dans sa propre prison...
En somme, de mon point de vue, ce serait la littérature considérée avant tout en tant que divertissement personnel — le roman choisi en tant que refuge.
Si je me hasarde à parler de tout cela, c'est seulement de la façon dont un ouvrier parlerait de son métier, de ses outils... Causons métier... Ce côté artisanal de la chose me plaît assez. C'est un plaisir d'ordre physique, manuel pour ainsi dire, que j'éprouve dans la recherche, dans le maniement des mots... A les palper, à les faire sonner...
On comprend que ce n'est pas là une préoccupation de romancier ; je veux dire sa préoccupation la plus importante. Je suis très près de déclarer que je ne suis pas romancier. Que l'on me dise enfin ce que je suis (...)


Henri Calet, Je ne sais écrire que ma vie,
édition établie par Michel P. Schmitt
Presses universitaires de Lyon, 20€

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire