samedi 9 janvier 2021

Une femme pour moi

Erika Schmied

 

3 février 1972 
Thomas m'explique qu'il prendrait immédiatement femme, mais il faudrait que ce soit une servante. Pendant plus de dix minutes, il énumère, comme il l'a déjà fait à de nombreuses reprises, tout ce qu'une femme ne devrait pas faire ou être. C'est une femme comme celle de son grand-père qu'il lui faudrait. Elle frottait (chaque semaine le plancher), recevait des invités, se chargeait des démarches administratives désagréables, écrivait de belles lettres, supportait que le grand-père ne lui adresse pas la parole pendant une semaine, sans demander pourquoi, mais ils ont eu tout de même trois enfants. C'est ce que j'aimerais avoir moi aussi, une femme pour le lit, mais j'aurais certainement tellement à redire sur le reste que je la chasserais au bout de deux jours. Une femme pour moi, ça n'existe pas. Ou bien c'est la fin. Je ne pourrais alors plus rien écrire. 

 

Karl Ignaz Hennetmaier, Une année avec Thomas Bernhard,
trad. Dieter Hornig
in Thomas Bernhard, Cahier de L'Herne 132,
(parution 27 janvier prochain)

 

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