mercredi 11 janvier 2017

Adieux démocratiques



- Tu sais qu'Antoine est à Paris ?
- Finfon ? Depuis quand ?
- Le week-end dernier, je crois. Il ne t'a pas appelé ?
- Ben non... Il a vendu sa maison ?
- Pas encore, mais il a de sérieuses propositions cette fois.
- De sérieuses propositions ou des propositions sérieuses ?
- ...Oui enfin, tu m'as compris...
- Justement, non. D'où la question...
- ...C'est pareil, il va finir par la vendre.
- Il y a une tendance aujourd'hui...
- ...Tu t'intéresses aux tendances, toi ?
- Si tu me laissais finir mes phrases...
- On en reprend une ?
- Tu pourrais la boucler ? - une fois la commande passée, je veux dire...
- Je t'écoute.
- Je ne sais plus ce que je voulais dire...
- Tu voulais me parler tendance.
- Ah oui !
- Alzheimer, nous voilà !
- Putain, tu vas la fermer ?!
- Donc, la tendance que tu as remarquée...
- Une certaine tendance à placer l'adjectif systématiquement avant le substantif. J'ai remarqué ça chez la fille de ma copine...
- Ça revient au même, non ?
- Pas du tout.
- Tu ne vas pas me faire un cours de grammaire, là...
- Je pense que c'est dû aux réseaux sociaux...
- ...Ça y est ! Encore tes théories sur la disruption.
- D'où tu sors ce mot ?
- De toi, pardi ! Tu m'as envoyé une vidéo l'autre jour...
- Et pardi, d'où tu sors ça ? Plus personne n'utilise cette interjection...
- Attends...
- Tu vérifies les statistiques sur l'utilisation de pardi ou c'est encore une alerte à la con ?
- T'as suivi cette histoire de révélations sur Trump ?
- Non. Mais, on parlait d'Antoine...
- Les Russes auraient des dossiers sur lui...
- Sur Antoine ?
- Oui, ça risque de compromettre la vente de sa maison.
- C'est de Russie que sont parvenues les sérieuses propositions ?
- Un oligarque qui cherche à monter un lupanar en banlieue...
- Avec des filles explosives venues d'Ukraine, irradiantes de sensualité.
- Et de radioactivité.
- Donc, Finfon, il est là pour quoi ?
- Du bénévolat.
- Les restos du coeur ?
- Non, le PS...
- ...Excellent !
- Je te jure que c'est vrai.
- Il est venu voter pour les primaires ?
- Pire. Il fait du montage.
- De tissus de mensonges ?
- Des vidéos de campagne.
- T'es sérieux ?
- Pour son candidat préféré.
- Montebourg ?
- Hamon.
- Je comprends pourquoi il ne m'a pas appelé, Finfon. Notre ami est devenu complètement dingue...
- Il y croit, que veux-tu ?
- Croire à quoi ?
- Au programme de Benoît Hamon.
- Comment peut-on croire une seconde à la sincérité de ces canailles ?
- C'est celui qui s'est le moins compromis.
- Le moins quoi ?!
- Compromis.
- Le moins con, promis !
- Fais pas le malin. Tu te fous de tout, toi !
- Non. Mais du PS, oui. Ce type a quand même été ministre de Valls, non ?
- Je ne sais plus. Attends...
- Merci Gougueule.
- Exact. Ministre de l'Education. Mais pas longtemps.
- Peu importe, ce type a cautionné un gouvernement de fripouilles et désormais se présente certainement comme l'homme providentiel, propre, incarnant le renouveau de la gauche et toutes ces conneries...
- Je ne sais pas. Il faut quand même faire barrage au FN.
- C'est avec ce genre de stratégie qu'on nous fait avaler toutes ces couleuvres. Et revoilà le vote utile. Quelle misérable démocratie ! Et l'autre con qui monte gratos des vidéos pour ces gredins !
- C'est bénévole...
- Mais c'est d'autant plus incompréhensible ! Le type est au chômage, dans la merde, ne peut plus payer sa maison qu'il est obligé de vendre, n'y arrive pas, doit s'exiler chez un pote au fin fond de l'Ardèche et vient travailler gratos pour cette mafia ? Seule la folie peut expliquer cela !
- Vu comme ça...
- La dernière ?
- En tous cas, Trump est bien dans la merde.
- Trump ne sera jamais dans la merde. En revanche des gens comme toi et moi, ou comme ce con de Finfon, c'est pour tout bientôt.
- C'est pas l'Ardèche.
- Trump ?
- Antoine. Il n'est pas au fin fond de l'Ardèche. Il est dans le Perche.
- Ben, mon vieux...
- Attends...
- Je t'ai déjà dit : ou tu coupes ta machine intelligente quand on se voit, ou on arrête d'aller boire des coups !
- Trump affirme qu'il n'a jamais mis les pieds à Prague.
- Qu'est-ce qu'on en a à foutre ?
- Tu sais pourquoi il soutient la Russie ?
- Parce qu'il aime les biscotos de Poutine ?
- Les poupées russes, surtout.
- On y revient ? Les filles explosives et irradiantes ?
- Il existerait une vidéo compromettante.
- Montée par Finfon ?
- Trump avec des putes russes, un truc comme ça.
- Je réitère ma demande : Qu'est-ce qu'on en a à foutre ?
- En tous cas, ces infos non encore vérifiées, ça agite les médias américains. C'est la CIA qui détiendrait ce rapport explosif...
- C'est vrai que c'est un organisme qui a prouvé sa fiabilité... Je ne sais pas si je vais réussir à dormir cette nuit avec tout ça. Les habitants de Mossoul non plus, remarque.
- Qu'est-ce que vient foutre Mossoul dans cette histoire ?
- Le fait même que tu ne comprennes pas justifie amplement que Mossoul s'immisce dans cette conversation absurde sur l'avenir du PS, Trump, Poutine et les putes russes...
- Si tu le dis... Tu sais que pendant qu'on parle, là, Obama fait ses adieux ?
- Tu sais que si tu continues comme ça, les adieux, c'est moi qui vais les faire ?

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