A quelques semaines du rituel quinquennal démontrant sans conteste que la France est une grande démocratie, en pleine puante campagne, paraît au Diable Vauvert un petit livre rouge fort instructif sur le fonctionnement de nos élites. Il est signé par l'avocat Juan Branco et, malgré le format réduit de l'ouvrage et son prix léger (7€), son titre sans équivoque en dit long : Treize pillards, Petit précis de la Macronie. Extraits du premier chapitre, consacré à l'ancien Premier ministre et maire du Havre et ancien d'Areva et président du mouvement par lui récemment créé, Horizons
(…) Après quelques années de progression, voyant sa carrière freinée suite à la malheureuse affaire de corruption qui allait toucher son parrain, Alain Juppé, il se proposait à son tour et en attendant de faire de l'argent. Enfin, mesurons. Nous disons « faire », mais nous devrions plutôt dire prélever, tant la construction semble en de telles mains impossible. Sans talent, dénué d'une quelconque expertise ou expérience professionnelle, il profitera de ses quelques semaines passées à conseiller le très cher Alain Juppé, nommé au ministère de l'Environnement après avoir été reconnu coupable de quelques menues affaires que la pudeur nous exige de ne pas détailler, pour s'autonommer dans l'une de ces anciennes entreprises d'État où les limites concernant la rémunération manquent de s'appliquer.
C'est ainsi que notre cher Édouard, 37 ans, se trouva propulsé directeur des relations institutionnelles auprès d'Areva au moment où l'entreprise faisait disparaître 4 milliards d'euros de fonds publics dans le cadre d'une affaire de corruption qui l'amènerait, quelque temps plus tard, à faire faillite, licencier plusieurs milliers d'employés et faire monter la facture d'électricité de l'ensemble des Français. Quelle y fut sa fonction ? Comme tout directeur du lobbying : couvrir la pourriture que d'autres semblables engrangeaient, jouer le rôle d'engrenage qu'un jour un autre pour lui jouerait. Engraisser pour s'engraisser, sans ne jamais travailler. A-t-on depuis sérieusement enquêté sur la disparition de ces sommes folles, dont il est acquis à ce stade qu'elles servirent à financer des hommes politiques – Patrick Balkany en bénéficia à la modeste hauteur de 4 à 8 millions d'euros – et étrangers ? Non. Édouard Philippe aura-t-il jamais été interrogé à ce sujet ? Non. Comme il n'aura jamais été interrogé au sujet de l'attribution de millions d'euros de subventions à Sciences Po Paris, menée au titre de ses fonctions de maire adjoint du Havre, suite au recrutement de sa femme par l'institution. Comme il n'aura jamais été interrogé sur l'utilisation des moyens de la mairie pour financer les sommets que Jacques Attali, sur ses terres, organiserait, en échange de services politiques bien sentis. Comme il n'aura jamais été interrogé au sujet de son pantouflage – c'est-à-dire sa prostitution – au sein d'un cabinet d'avocats anglosaxon après avoir intégré le Conseil d'État, cabinet aux rémunérations extravagantes d'où il aiderait des entreprises étrangères à gagner des contentieux contre l'État, c'est-à-dire contre nous, Français, qui l'avions rémunéré pour étudier puis lui avions donné, au sein dudit Conseil, la charge de juger au nom du peuple français des affaires dans lesquelles d'autres puissances il finirait par conseiller.
Édouard Philippe n'aura pas plus été interrogé, en quatre ans de mandat, une fois Premier ministre nommé, sur son rôle dans l'élaboration, l'adoption et l'exécution des violences politiques qui blessèrent, entre 2018 et 2020, 2500 citoyens qui réclamaient égalité et dignité et surtout, fin des pillages systématiques qu'ils étaient chargés de payer. Ni sur les 10 000 arrestations, ou encore les lycéens agenouillés par un fragment avarié des forces de l'ordre mises au service de ses intérêts, qui intervinrent pendant la période mentionnée, afin d'assurer que personne ne vînt remettre en cause le système auquel il participait. Ni sur les instructions données par son gouvernement auxdits gendarmes et policiers pour taper, éborgner, mutiler jusqu'à ce que la peur les amène à se défaire et s'écraser.
(…) Ce Premier ministre sur lequel personne n'a enquêté avant qu'il ne soit nommé, aura-t-il été interrogé davantage sur ses liens avec le CAC 40, avec les principaux bénéficiaires du CICE qui les gilets jaunes engendreraient, cette pérennisation des allégements de charges inventés par Jérôme Cahuzac et Emmanuel Macron, qui retirèrent chaque année 20 milliards d'euros de ressources à l'État pour nourrir ce que le petit Paris avait de plus avarié ? Sur ses relations intimes, par exemple, avec le PDG de Carrefour - le fondé de pouvoir de Bernard Arnault, qui lui-même était devenu le plus proche ami du Président après que Brigitte Macron eut enseigné le français à ses enfants dans une école privée où la mère du ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, exerçait ; Bruno Le Maire qui, de concert avec M. Macron et M. Philippe, annihilerait un peu plus encore l'école publique, dont ils avaient été à tout instant préservés, lors des cinq ans qui les vit à nos destinées présider –, Alexandre Bompard donc, qui, alors que cette mesure se préparait, invitait régulièrement son « copain » à dîner dans son appartement parisien aux côtés du gotha et de sa femme, Charlotte, par Édouard Philippe recrutée afin de s'assurer qu'ainsi leurs intérêts à tous seraient protégés, en une orgie concupiscente d'intérêts mêlés aux plus fins mets servis par des domestiques que nous rémunérions, au moment où les agriculteurs étaient obligés d'envahir les Champs-Élysées pour faire entendre leur voix et demander à ce qu'on les épargnât, à ce qu'une juste rémunération pour lesdits mets leur fût accordée, sans qu'une quelconque considération ne leur soit accordée ? 800 millions d'euros d'allégements fiscaux et le recrutement d'une femme quelque peu désœuvrée par un Premier ministre pouvaient, lors d'un dîner où les blagues sur leurs cousins prolos fusaient, être débloqués, tandis que des milliers de tracteurs, en vain, sur les Champs défilaient. Voilà l'époque où l'on vivait (…)
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