– C'est la bande-annonce de ce qui nous attend cet été…
– Tu es sûr que c'était un moustique ?
– Sûr et certain. Comme on l'est lorsque l'on dort.
– Tu as été piqué ?
– Non, je pense qu'il est passé en éclaireur.
– Ça ne t'a pas empêché de dormir, je t'ai entendu ronfler...
– J'ai eu chaud.
– Tu as cru y passer ?
– Non, réellement…
– Comme lorsqu'on rêve ?
– Justement, j'ai fait un drôle de rêve : Eddy Mitchell était mort.
– Quoi ?
– Eddy Mitchell.
– Je pensais qu'il était déjà mort...
– Ne parle pas de malheur.
– Tu aimes Eddy Mitchell, toi ?
– Je ne sais pas. Un peu. Disons qu'il m'est familier. Tu vois, la mort de Johnny m'a laissé totalement indifférent, mais celle de tonton Eddy me chagrinerait, je pense... Je l'ai beaucoup écouté à une certaine époque.
– Tu étais triste ?
– A cette époque ?
– Dans ton rêve.
– Certainement. Bouleversé, dirais-je – si on utilisait dans les rêves le même vocabulaire frelaté que dans notre pauvre réel…
– C'était quelle époque ?
– Dans le rêve ?
– Celle où tu écoutais Eddy Mitchell.
– L'adolescence. J'étais baigné de variétés, de chansons populaires, comme disait l'autre. Avec les radios, qu'on nommait périphériques, que mes parents écoutaient, la télé...
– La Dernière séance.
– Oui. Mais ça, c'est venu après. Je ne ratais aucune diffusion. Ce qui plaisait tant à un pauvre type comme moi, qui n'avait aucune culture, c'était la salle de cinéma, le dessin animé de Tex Avery, les anciennes pubs et la double programmation. On regardait ça en famille... Sans parler évidemment de la présentation des films, un mot sur le réalisateur Budd Boetticher ou John Sturges, tout cela avec le ton de tonton Eddy, son humour...
– C'est drôle, il ne m'a jamais beaucoup intéressée. La seule chanson dont je me souviens, c'est « La Fille aux yeux couleur menthe à l'eau ».
– Je crois que le titre était plus court, mais oui, c'est une belle chanson. Dont je n'ai saisi les paroles que bien plus tard. Mais j'aimais ce type avant les années 80. Avec des chansons comme « Le Parking maudit ».
– Il avait le sens des titres !
– Je te sens moqueuse.
– Avoue que ce n'est pas commun, une chanson sur un parking.
– C'est surtout une chanson sur des contractuelles.
– De mieux en mieux...
– Des filles pas très jolies qui sont contractuelles le jour. Mais gagnent leur vie la nuit, devenant belles dans le noir.
– Sur ce fameux parking ?
– Tu as tout compris.
– Ce n'est pas possible. Là, c'est toi qui te moques !
– Pas du tout. Et ce n'est pas fini. Tu ne connais pas le père Moine...
– Le père Moine ?
– Tonton Eddy, alias Claude Moine.