vendredi 28 avril 2023

Qui est absent ?

 

Alfredo Camisa

En novembre 1960, Alejandra Pizarnik a 24 ans et vient d'arriver à Paris. L'Argentine y restera quatre années. Le deuxième volume de son Journal, qui couvre cette période, vient d'être publié par les inestimables éditions Ypsilon, chez qui est disponible l'ensemble de l'œuvre de cette chère Flora.

On dit que, quand la mort approche, le passé fait irruption et se répand dans la mémoire comme un sac de pierres qui soudain se casse. Alors, cette nuit, j'ai vu et j'ai su de vieilles choses : partout où je me voyais, je souffrais. Je souffrais comme on respire. Pourquoi est-ce que je souffrais ? La même chose que maintenant : douleur d'absence. Qui est absent ? Je ne sais pas, mais il y a quelqu'un qui manque. Je suis venue en Europe pour chercher qui me manque. Mais que peut une jeune femme seule dans un monde grand? Et comment et par où commencer à chercher. Tout ça, c'est de la folie. La folie commence quand les désirs les plus profonds veulent se réaliser…

 

 

Alejandra Pizarnik,
Journal II. Années françaises (1960-1964),
traduction et postface, Clément Bondu.

5 commentaires:

  1. Merci pour cette découverte.

    "J'ai sauté de moi jusqu'à l'aube
    J'ai laissé mon corps près de la clarté
    et j'ai chanté la tristesse de ce qui naît"

    (Alejandra Pizarnik)

    Le malheur des uns fait l'affolant plaisir de lecture des autres...

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    1. Cher marquis, la Pizarnik est terriblement tourmentée mais pleine d'autodérision également… Bonne future lecture !

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  2. Alejandra a connu Pyere de Mandiargues dans ces années à Paris, un auteur que j'apprécie. J'ai pu télécharger une partie de leur correspondance (1954-72 - Ypsilon), elle écrivait un français approximatif touchant,  « ce français merveilleux que parlent les étrangers  » écrit Isabelle Baladine Howald dans une belle note de lecture :
    https://poezibao.typepad.com/poezibao/2018/09/note-de-lecture-alejandra-pizarnik-andr%C3%A9-pieyre-de-mandiargues-correspondance-par-isabelle-baladine-.html

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  3. Correspondance 1961-72, vous aurez rectifié.

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    1. J'ai croisé ivre un soir, dans un ascenseur, la petite fille de Pyere de Mandiargues... c'est à ce jour mon seul contact avec cet auteur que, comme tant d'autres, j'ai sous le coude dans un coin de la tête. Heureusement je n'aurai pas assez de cette vie pour les solliciter tous... Merci pour le lien.

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