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Přemysl Koblic |
Les filles du chant sont venues:– « Veux-tu de nous ? Nous sommes nues,
nos lèvres sentent la lavande »…
– Je songe aux ravins de Finlandeoù dorment des soldats de gel...
Les vierges de sel du poèmem'ont dit : – « Il est temps qu'on nous aime !
Nous sommes nues sous la peau. »
Je songe aux navires sous l'eaunoyés derrière les vitrines…
Les molles putains de mon songeme crient : – « Lâche pied et plongeque les poissons sont frais et muets ! »
– Je songe aux forçats d'Allemagne :ils sont maigres sous le fouet...
Les douces mères du sommeilme choient : « Couche-toi ! Les orteilsdressés vers la pointe du somme.
La belle au bois qui dort dans 1'hommene se nourrit que de baisers… »
– Je songe aux énormes brasiersqui brûlent autour de la terre...
La vieille édentée de la mortm'a dit : – « Chaque cheval a son mors.Ton lot sur terre est la mort lente.Que ça te déplaise ou non, chante !Nul être n'a droit au merci...A quoi penses-tu, ombre vague ? »
– O très chère, je songe à Prague !Je n'entends pas, je n'entends plusles prières de ses synagogues...
Benjamin Fondane,in Le Mal des fantômes, Verdier poche, 2025
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