Les élégantes éditions Ypsilon viennent de compiler en un volume 15 années de poésie d'Alejandra Pizarnik, dans un format sympathique et pour un prix modique. La traduction est assurée par Jacques Ancet. Un portrait de la poétesse argentine, portant la signature de Liliane Giraudon, figure en postface.
silence
je m'unis au silence
je me suis unie au silence
et je me laisse faire,
je me laisse boire
je me laisse dire
***
Tu choisis le lieu de la blessure
où nous parlons notre silence.
Tu fais de ma vie
cette cérémonie bien trop pure.
***
Ce sont mes voix qui chantent
pour qu’ils ne chantent pas, eux,
les muselés grisement à l’aube
les vêtus d’un oiseau désolé sous la pluie.Il y a, dans l’attente,
une rumeur de lilas qui se brise.
Et il y a, quand vient le jour,
un morcellement du soleil en petits soleils noirs.
Et quand c’est la nuit, toujours,
une tribu de mots mutilés
cherche asile dans ma gorge,
pour qu’ils ne chantent pas, eux,
les funestes, les maîtres du silence.
***
Les absents soufflent et la nuit est dense. La nuit a la couleur des paupières du mort.
Toute la nuit je fais la nuit. Toute la nuit j'écris. Mot à mot j'écris la nuit.
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