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Tore Johnson |
Dans les premières pages de son réjouissant essai, sobrement intitulé Hemingway, Laurent Jullier note :
...les histoires d’Hemingway finissent mal. Pire encore, elles ne sont au service d’aucune religion, d’aucune noble cause, d’aucun idéal élevé. Là-haut, tout là-haut, il n’y a rien. Nada. « Nada, y pues nada y nada y pues nada », comme le martèle un de ses personnages. Rien, et puis rien et rien et puis rien.Dans cette logique, nous sommes faits de molécules organiques qui finissent toujours par se désassembler au bout de quelques années passées à collaborer. Et tout le reste est fiction, images et consolation. Inutile, pourtant, d’en faire une maladie, ou d’y voir un prétexte à devenir amer et cynique, puisqu’existe un moyen d’affronter cette logique avec calme et dignité. Il consiste à se livrer à des activités qui ne séparentpas la tête des jambes.Italo Calvino l’avait deviné : « Le héros d’Hemingway veut s’identifier aux actions qu’il accomplit, pour échapper au sentiment de vanité de tout, de désespoir, de défaite et de mort. » Hemingway lui-même avait trouvé quelques-unes de ces actions, qui fonctionnaient à condition d’être bien exécutées, c’est-à-dire avec la tête à ce qu’on fait : pêcher, chasser, boire, faire l’amour et, surtout, quelque chose d’encore mieux, de fabuleux et d’imparable, qui est la clé de l’émerveillement de Duras, mais qui ne peut pas être dit tout de suite.Il faut d’abord préparer le terrain.Et en premier lieu, se débarrasser du suicide. Surtout si l’on pense à ce qu’écrit la critique du New York Times à propos de la dernière biographie en date d’Hemingway : au bout de sept cents pages de détails, on a vraiment envie qu’il l’empoigne, son satané fusil !
D’ailleurs, les deux sont liés – les choses qu’on fait bien, et le suicide.
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