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Stephen Uhraney |
l'air pénétré
comme à l'église
elle lisait une enquête de sam spade
en m'attendant
je suis resté un temps
à l'observer
derrière la vitre
sans oser entrer
nos dix années d'écart
son sérieux m'impressionnaient
je ne connaissais rien à hammett
ni aux polars
ni aux filles
mais comme elle
certainement
et comme tous les caniches
je croyais
chercher l'amour
dans les films
apprendre à se tenir
dans les livres
je pensais encore
qu'un mot jeté au hasard
pouvait détruire l'univers
une phrase juste vous sauver la vie
je n'ai pas eu le temps de m'asseoir
Tu habites loin ?
En face
j'aurais aimé prendre un verre
acheter le courage
mais déjà
triomphante
une bouffée d'iris sauvage se dirigeait
vers la sortie
j'avais de quoi préparer une salade
Arrête tes histoires
Je préfère avaler autre chose
souffla-t-elle
en filant dans la salle de bains
pas le temps de penser
mettre un peu de musique
danser enlacés
elle était déjà allongée
sur le ventre
et m'offrait ses fesses
légèrement remontées
une intro sans préface
sans sentiments
à la hussarde
professionnelle
j'avais tout juste vingt ans
l'heure où l'on regrette
d'avoir manqué l'école
comme son ami jacques
qu'elle se mit à chantonner
après l'amour
charles brun, détruire l'univers, mode d'emploi
J'ai corrigé quelques maladresses de mon commentaire précédent :)
RépondreSupprimerA chaque fois que je lis un poème de Charles Brun, je suis ébloui, sonné, vaincu par KO. "Détruire l'univers, mode d'emploi", cette formule est irrésistible. Et comme à chaque fois, l'envie me vient d'arrêter de griffonner mes propres babioles. D'abandonner mes "velléités expressives". Tout mon charabia autobiographique. De dire "Pouce, ok, j'ai perdu." Le vrai talent, ça s'entend tout de suite. C'est direct, simple et beau, comme un crochet du droit, ou comme un coup de foudre. Comme souvent, Charles écrit, et avec ce qui semble une formidable facilité, ce que je ne sais pas dire. Où du moins pas comme ça. Je tourne autour du pot de ma vieille vie, cherchant éternellement la phrase juste, lui, l'écrit sans problème et sans la connaître. Ma vie. Il l'écrit, comme ça, vite fait, sur un coin de nappe, pour payer son loyer. Ce chef d'oeuvre de simplicité sera donc chanté dans les bordels enfumés, devant un public de losers mélancoliques, et je viendrai moi aussi, tous les soirs, écouter ma vie en pleurant dans mon verre.
Max.