André Kertész |
Ainsi appelé parce qu'il est minuscule : il en faut trente milliards pour remplir un dé à coudre ; et encore, le dé à coudre n'est pas très plein. L'homme qui craint l'éléphant, la baleine, le diplodocus et le mastodonte n'hésite pas à attaquer le minus. Il a tort. C'est la bête la plus cruelle, la plus féroce et la plus forte du monde. Elle vient à bout de tout […]
Le minus se nourrit naturellement d'hommes qu'il attire dans son HLM. et qu'il réduit en poussière à son aise, mais ce qu'il préfère ce sont les grandes agglomérations, voire les nations prises dans leur entier. Des villes à l'importance des grandes capitales : Moscou, Paris, Tokyo, Londres, etc., sont dévorées par le minus qui n'en laisse rien que le nom. Il s'attaque d'abord à ce qu'il y a de plus succulent en elles : les bordels de toutes catégories. On finit par ne plus avoir de peintures, plus de livres, plus de journaux, plus de gouvernements, plus de ministres, plus de chefs d'Etat, plus de police, et comme l'absence de ces denrées pourrait mettre la puce à l'oreille aux survivants, des chiffres astronomiques de milliards de minus se déguisent en peintures, livres, journaux, gouvernements, ministres, chefs d'Etat, police et etc., et le tour est joué. On continue à voir briller les coupoles des Elysée, des Kremlin et les palais du Congès mais il n'y a plus rien dessous.
Ou plus exactement si, il y a quelque chose dessous, il y a désormais le minus.
Les éditions suisses Héros-Limite ont pris l'excellente initiative de republier Le Bestiaire de Jean Giono, préfacé par Henri Godard. 19 textes de divertissement rédigés entre 1956 et 1965, et complétés de citations littéraires rares et farfelues. Un régal. Nous savons combien un certain fat président a un jour avoué devoir beaucoup à Giono. Nous lui dédions cet extrait.
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