Alexander Rodchenko |
Après l'impressionnant recueil de 5000 poèmes paru l'an dernier au Cherche Midi sous le judicieux titre de Je me transporte partout, c'est un seul et unique et inédit poème que les éditions de la Grange Batelière — qui doivent leur nom, je me le rappelle en passant, à la rue du 9e arrondissement parisien que j'ai bien connue pour y avoir vécu deux ans durant, seul, dans un ancien hôtel de passe transformé en logement insalubre et lugubre, à deux pas des passages Verdeau et Jouffroy, artère devant quant à elle son nom à un cours d'eau souterrain ayant plus ou moins existé, mais c'est une autre histoire, jonction parfaite entre l'alors encore populaire Faubourg-Montmartre, ses marchands de falafels et de cornes de gazelle, sa boutique de farces et attrapes et son Palace, et de l'autre côté, la rue Drouot et son hôtel des ventes, Barbara, ses antiquaires, ses gargotes guindés et ses froids sièges de monstrueuses banques — bref, publient aujourd'hui. Un livre court, impeccablement fabriqué par Arnaud Frossard, consacré à un bandit londonien, intitulé Les Poèmes de Julius White, qu'on lira comme on veut, de A à Z, comme une nouvelle en vers, un journal de bord, ou pourquoi pas au hasard, mais de haut en bas, tels des morceaux lyriques à thème unique, que l'on relira avec appétit pour en mieux saisir la richesse, la générosité et la liberté de l'auteur, un certain Jean-Claude Pirotte, qui se cache à peine sous le nom d'Ange Vincent, le prétendu traducteur du prépendu Julius White. On se tait, extrait :
c'est comme si je tenais un journal
où seul le brouillard est présent
et qu'autour de moi les fantômes
lisaient par dessus mon épaule
la certitude d'être jeune
et le sentiment d'être vieux
se reflètent dans l'eau du fleuve
à condition de s'approcher
du miroir où tout se confond
et comment pourrais-je savoir
à quel oracle m'adresser
quand le vent chasse les brouillards
les fantômes et le passé
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire