lundi 6 août 2018

Prolongations


Je tombe par hasard – comment faire autrement ? – sur un article signalant une étude nord-américaine autour de la lecture. J'y apprends que 24% de nos amis américains n'ont pas ouvert un seul livre dans l'année précédant la question. 37% de ce fragment de la population est composé de personnes ayant un faible niveau d'études mais de seulement 7% d'Américains diplômés. Bien entendu, sur le plan socio-économique, comme disent les sociologues, il ressort que les personnes enregistrant un revenu annuel inférieur à 30 000 dollars lisent moins que celles mieux loties en termes de salaires et autres entrées d'argent.
Rien de bien surprenant dans tous ces chiffres. En revanche, plus loin, je dois relire la phrase. L'enquête parvient au syllogisme suivant : lire prolonge l'espérance de vie ! Qui plus est, les lecteurs de fiction vivent plus vieux que les lecteurs d'essais. Une femme affirme même être parvenue à résoudre certains problèmes grâce à des romans – on ne nous donne malheureusement aucun titre, pas plus qu'on ne nous précise de quels problèmes souffrait cette heureuse lectrice. En résumé, il suffirait de lire une moyenne de 30 minutes par jour pour vivre 23 mois de plus que ceux qui préfèrent les selfies ou la chirurgie esthétique – j'apprends par ailleurs que ces deux activités sont désormais liées, mais c'est une autre histoire… 
Je ne sais si c'est la canicule, mais je me sens assez désorienté par ce nouveau coup dur, encore un peu plus à la marge. Admettons que lire augmente l'espérance de vie, on ne m'enlèvera pas l'idée que ça ne pourra jamais grossir les maigres espoirs que l'on peut raisonnablement placer dans cette vie. Mais étrangement, n'appartenant à aucune catégorie citée dans cette enquête – j'ai un niveau moyen d'études, des revenus ridicules, mais lis beaucoup –, je ne me sens nullement concerné par ces prolongations annoncées dans un monde grotesque qui court inévitablement à sa perte.

2 commentaires:

  1. Vous êtes un incurable inconsolable. Il est bien connu que la lecture du Portrait de Dorian Gray ou de la Peau de chagrin vous fait prendre six mois de rab' sur une espérance de vie dont on ne connaîtra jamais à combien elle se montait des fois que ce concept n'aille signifier. quoi que ce soit.
    Sur ce, je rallume ma clope et me ressers une petite mousse.
    Jules

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    1. Vous avez entièrement raison, cher Julio, je vais me remettre à fumer…

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