mardi 2 juin 2020

Retour durable des jours heureux


Alors que la grosse vedette de téléréalité aux cheveux orange d'outre-Atlantique entend faire mater ses administrés en colère par l'armée, qu'ici, chez nous, un ministre condamné pour harcèlement sexuel et un autre élu maire décident quoi qu'il en coûte de rester fidèles à leur engagement au sein de notre bien riant et courageux gouvernement exemplaire, la bonne nouvelle du jour, de celles qui apaisent et nous remplissent de joie — et je pense tout particulièrement au bien-être de l'un de nos humoristes alcooliques préférés qui se verrait bien calife à la place de Jupiter —, c'est, vous l'aurez compris, le déconfinement tant attendu et réclamé de nos bars et restaurants. Si l'on ajoute que la scène littéraire fait également sa rentrée en force et en forme — le milieu n'a-t-il pas tout récemment réclamé, outre le fromage et le jambon, une aide d'urgence de 500 millions d'euros à l'Etat ? —, comment ne pas oublier nos petites déconvenues de cette fin d'hiver ? Quel confiné n'a pas rêvé du moment où il pourra enfin se poser en terrasse, en compagnie d'une belle mousse et d'un bon livre ? Ces jours heureux sont arrivés ! — enfin, pour ceux qui ont encore un emploi... Afin de pleinement les savourer, nous suivrons les conseils éclairés de nos médias adorés avec la garantie de bronzer malin, tout en respectant bien entendu les gestes de sécurité intérieure.
Il y a quelques jours, Le Figaro nous révélait que l'auteur le plus vendu pendant le confinement n'était autre que l'illustre et indispensable Guillaume Musso. Et ce, alors que son nouveau titre, La vie est un roman, n'était pas encore disponible —  il l'est depuis le 26 mai... Le beau Guillaume aurait durant l'enfermement, nous dit le canard d'assaut, cartonné grâce à l'édition de poche de La vie secrète des écrivains, devançant de peu ses non moins méritants collègues, Michel Bussi avec son titre bashungien J'ai dû rêver trop fort, et Aurélie Valognes avec sa charmante Cerise sur le gâteau. Comme on le voit la littérature française se porte bien.
Et tient ses promesses, nous jure-t-on dans une sélection concoctée par Sandrine Bajos et Pierre Vavasseur pour Le Parisien. Ces très chics coups de coeur du journal de LVMH nous mettent la mousse à la bouche — que nous consommerons sans soif mais en respectant le petit doigt sur la couture du bermuda, et au nom de la liberté retrouvée, la modération sécuritaire de mise. C'est la belle et irrésistible Amanda Sthers qui ouvre le bal avec, chez Grasset, sa longue Lettre d'amour sans le dire — 130 pages ! L'histoire d'une professeure de lettres, un peu paumée, logée « dans les quartiers huppés de Paris, chez sa fille, Marine, qui a fait un riche mariage ». Cette pauvre héroïne à la dérive va tout de même connaître l'extase en s'abandonnant un beau jour aux mains d'un masseur japonais. « Un univers d'une délicatesse et d'un respect extrêmes », comme on les aime. « Jamais la plume d'Amanda Sthers n'avait été aussi intense et tendre à la fois », nous certifient nos experts. Loin de nous d'en douter. Les jours brûlants est, apprend-on, le cinquième roman de Laurence Peyrin, « entrée en fanfare en littérature en 2015 avec La Drôle de vie de Zelda Zonk », ajoutent les salariés du milliardaire Bernard Arnault. Dans une bourgade proche de Los Angeles, nous y suivons les aventures mouvementées d'un chirurgien orthopédique, figure de la bourgeoisie locale, et de son épouse. Un incident « bref et violent, étranger à la vie du couple » poussera la femme « à tout abandonner pour Las Vegas, la Ville du Péché ». La vache ! « Avec cette explosion intime et volcanique, Laurence Peyrin rejoue et regagne », estiment nos amis Sandrine et Pierre.
Puis, c'est au tour d'Olivier Adam de passer, disent-ils, au rouge avec « l'histoire d'Antoine, 18 ans, lié du jour au lendemain au destin de Leïla, maman d'un petit Gabi, qui lui demande de la sauver des griffes de son homme lequel, Antoine l'apprend à ses dépens, n'est pas un tendre. Envoûté par les baisers de la belle, il n'a qu'une solution. Les emmener sur la côte sud. » La distanciaton sociale est en effet, dans ce cas — Les Roches rouges, en l'occurrence, chez Laffont — et dans tous les autres, la meilleure solution.
L'impérissable Françoise Bourdin, « cavalière émérite chevauchant le box-office littéraire au fil de chroniques familiales qu'elle s'est employée à envisager sous tous les angles » serait, nous dit-on par la suite, dans la tourmente. Une nouvelle célébrité victime de la Covid ? Fort heureusement, il ne s'agit que d'une accroche pour nous faire pénétrer sans plus tarder au sein d'un « quadrille psychologique entre deux sœurs, Caroline et Diane Serval, versées dans la médecine, et les frères Paul et Louis Lacombe ». Avec Quelqu'un de bien, Bourdin, romantique optimiste devant l'éternel, « va remuer les tourments cachés des uns et des autres, entre chaleur, grêle et mistral », dans un seul but : « chercher le meilleur de l'homme ». La fin justifie nous le savons les moyens.
Enfin, place à la nouvelle venue en littérature, Olivia Ruiz. L'ex-candidate d'une célèbre téléréalité (décidément !) nous livre, à 40 ans, les « thèmes qu'elle porte en elle depuis toujours », l'exil et de la transmission. La Commode aux tiroirs de couleurs (Lattès) est « un récit magnifique et bouleversant » dans lequel une jeune femme découvre dans la commode héritée de sa grand-mère, l'histoire de sa vie : enfant, elle a dû fuir l'Espagne de Franco. Dans ce récit où « tout est faux mais où tout est vrai aussi (...) l'interprète de J'traîne des pieds ouvre avec délicatesse [donc pas avec les pieds] la porte des secrets de famille et des non-dits ».
Sinon, je me répète peut-être, mais y'a Manchette...

1 commentaire:

  1. Et encore, nous n'avons toujours pas subi la vague des "journaux du confinement", qui ne saurait tarder à déferler...

    Je gage que, depuis l'île de Ré ou quelque refuge solognot, nous pourrons savourer de beaux morceaux de bravoure.

    En cela, nous suivrons votre conduite cher Inconsolable : nous en rirons.

    Bien le bonjour,
    Pierre

    Pierre

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