lundi 3 août 2015

Au lit !




J'espère que vous allez pouvoir m'aider. Cette nuit, j'ai fait un rêve. Je sais : rien d'extraordinaire a priori. Sauf pour moi. D'habitude, je ne me souviens pas de mes rêves. Jamais. Exceptés quelques cauchemars qui me réveillent, ou certains rêves récurrents comme celui, proche du cauchemar il est vrai, dans lequel je me retrouve en cours d'Histoire-géo et c'est devoir sur table. Je n'étais pas au courant et n'ai pas révisé, c'est la cata. J'ai fait ce rêve longtemps après avoir quitté le lycée, mais cela fait maintenant quelques années que cette angoisse m'est épargnée. Sont sauvés également quelques songes érotiques, sur lesquels je ne m'étendrai pas ici. Ou alors, plus tard. Habituellement donc, impossible de savoir ce dont je rêve. Je sens que j'ai rêvé, mais je ne sais de quoi. Or, la nuit dernière a été prodigieuse. Je me suis réveillé et me suis étonné de mon rêve. Je pouvais décrire parfaitement sa construction fabuleuse et me surprenait sa logique très réaliste, l'enchaînement des scènes que je me rappelais entièrement. Je me suis fait cette réflexion en pleine nuit, dans cet état de semi-sommeil que nous octroie l'inconscient. Je n'en revenais pas. Jamais je n'avais fait un rêve aussi bien dramatisé, un modèle en la matière. Un détail m'obsède cependant, celui de ne pas me souvenir de ce dont il s'agissait. 

***

J'étais hier au supermarché. Au rayon huile et condiments, un type semblait perdu, détaillant désespérément les étiquettes de toutes les bouteilles d'huile. Son fils avait l'air aussi ahuri. Ils m'inquiétaient. Peut-être appartenaient-ils à une cellule dormante sur le point d'agir. Le visage du type a changé lorsqu'il aperçut un employé du magasin en veste rouge. D'un bond, il fut à sa hauteur. Toujours aussi intrigué, je fis quelques pas dans leur direction. « Est-ce que vous auriez, c'est pour le gosse, de l'huile de coude ? J'en vois pas en rayon », dit le père. « De l'huile de coude ? Ça me dit quelque chose, je crois qu'on en a, mais je ne suis pas du rayon. Venez avec moi, je vais demander à une collègue », répondit le vendeur en autre chose. Ils se dirigèrent vers les caisses. Je fis semblant d'en avoir fini avec mes courses et les suivis. Le vendeur interpela une caissière : «Tiens, Samira, monsieur cherche de l'huile de coude, tu sais si on a ça ? » Et le père de rajouter : « C'est pour le gosse. C'est sa maîtresse, parce qu'il est passé juste-juste, qui lui a dit que l'année prochaine, il va falloir mettre un peu d'huile de coude, et j'en n'ai pas trouvé ». Samira a éclaté de rire. Et devant l'embarras des deux hommes et du gamin, elle a expliqué ce qu'était ce mystérieux brevage introuvable. 

***
En rejoignant mon vieux scooter, je croisais un homme âgé soutenu par une canne d'un coté, par un jeune mec de l'autre. Tandis que je défaisais mon super U, j'entendais les conseils prodigués par deux glandeurs qui se tenaient à quelques mètres de ce couple étrange, appuyés sur la rambarde des escaliers menant au métro. «Reposez-vous un peu avant de rentrer chez vous ». Le vieil homme n'avait rien à faire de leurs lumières. Les entendait-il seulement quand ils voyaient dans les marches de l'escalier le havre inespéré qui s'offrait à lui ? L'ancien ne tenait pas debout. Il ne parvenait pas à faire un pas en avant sans revenir aussitôt, comme aimanté par son ancienne position, basculer en arrière. Ça a duré un bon moment. Comme ces buts répétés au ralenti indéfiniment. Un handicapé, pardon, une personne à mobilité réduite en état d'ivresse, ça ne manque pas de piment. Je me disposais enfin à aller prêter main forte au jeune homme quitte à me faire voler ma vieille Vespa, quand je les ai vu avancer de cinquante centimètres jusqu'à la vitrine de la pharmacie. Là, le vieil ivrogne demandait totale assistance. Il avait besoin de ses deux mains pour vider sa vessie. Le silence et un sentiment incertain, proche de la stupéfaction, inconfortable, travaillait maintenant le visage des deux teneurs de mur. C'était comme un miroir. J'étais chez Fred Deux. Ou dans mon enfance. J'ai retrouvé d'un pas mal assuré ma bécanne qui ne séduisait plus personne depuis longtemps et suis rentré me coucher et, malheureusement, lu les dernières pages de La perruque.

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