samedi 4 octobre 2014

S'informer fatigue



Je ne lis plus les journaux. Presque plus. Je les survole en ligne. Quelques blogs. J'écoute vaguement la radio (France culture, de plus en plus vaguement) le matin, un peu en fin de journée. Et ça me suffit. Je me souviens d'une époque où j'achetais les journaux fiévreusement. El País surtout lorsque j'étais étudiant, tous les jours. Il y eut la période Le Monde, celle consacrée à Libération, parfois L'Humanité (rarement quand même), quelques publications libertaires, et Le Monde diplomatique, histoire de prendre un peu de recul, essayer de comprendre, entendre un autre son de cloche, de me former aussi. J'écrivais et lisais. 
C'est en cotoyant vaguement certains journalistes que je me suis éloigné de la presse. J'ai travaillé, un temps, à un documentaire sur le sujet. Je pensais qu'il serait intéressant de montrer comment on s'informe, comment ça pense, hiérarchise… Personne n'en a voulu. Je ne me suis pas acharné. Déjà, je me perdais dans un certain nivellement des informations, la place accordée à un match de football (seule culture que m'a inculquée mon père) était aussi importante que celle dédiée à la politique internationale ou aux décisions économiques.
Le travail de Pierre Carles, celui d'Acrimed, ajouté à quelques cours d'Ignacio Ramonet à la fac, certaines lectures de Bourdieu ou de Debord finirent par me dégoûter du mode de fonctionnement de l'information, des mains noircies par le papier imprimé, des sourires de convenance et des discours de connivence. 
Sans parler de ce qu'est devenu le traitement de l'info avec internet. Sur la page d'un journal en ligne, personne ne s'étonne plus de trouver le démenti de l'information donnée une heure avant par ce même site. 
Produits d'entretien de l'inertie de la pensée, de l'idéologie ultralibérale, de la peur ambiante, les grands médias puent. La somme d'informations dégueulées chaque jour suffirait à occuper nos cerveaux disponibles toute une vie. La profusion d'événements inutiles et incontournables, distrayant de l'essentiel, le fait divers qui fait diversion comme disait l'autre, mon propre ricanement devant le spectacle quotidien, me conduisirent, progressivement et définitivement, à consacrer à la littérature, et un peu à la philosophie, l'essentiel de mon temps de lecture, activité toujours insatiable fort heureusement. Quant à l'écran de télévision, il est devenu depuis longtemps un simple moniteur vidéo. Aussi, je me retrouve souvent dans la situation inconfortable de ne pas savoir de quoi, de qui, parlent les personnes autour de moi lorsqu'elles évoquent une question importante de leurs vies, un débat d'aujourd'hui. Cette impression d'être un imbécile… J'aimerais leur suggérer que Bove, Fante ou Carver, Cioran ou Dostoievski, Charles-Louis Philippe, Dabit, Roth, Leonard Michaels ou Bukowski, seraient tous plus à même de leur parler de leurs vies, mais lorsque je m'y risque, ayant pourtant pesé chaque mot, ça ne loupe pas, je passe pour un cuistre à leurs yeux. Pour qui se prend-il, ce fils d'ouvriers ?

Cadeau (pour ceux qui ne connaissent pas vraiment, ont oublié, et puis parce que bon, quand même quoi…) http://www.monde-diplomatique.fr/2014/10/HALIMI/50841#nb1

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